Impact environnemental des éoliennes >500 kW

Impact environnemental des éoliennes >500 kW

Selon le rapport du GIEC (2014), l’impact environnemental de l’énergie éolienne serait l’un des plus soutenables avec aujourd’hui ± 10 gr de CO2équivalent/kWh

À titre comparatif, voici quelques chiffres du GIEC (2014) :
Source d’énergie Impact en gr de CO2 équivalents par kWh
Parcs éoliens 11
Panneaux solaires 27 (20-25 selon d’autres sources plus récentes)
Centrale à gaz  490
Centrale au charbon  820 (+Particules fines)
Nucléaire 12  (+Risque de catastrophe nucléaire)

La plus grande éolienne mesure 187 m de diamètre (2017) et des projets jusqu’à 220 m de diamètre sont en projet en 2019 (une éolienne Haliade-X qui sera installée à Rotterdam)((https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/saint-nazaire-44600/eolien-ge-acheve-ses-deux-rotors-geants-saint-nazaire-6394349)). Cela représente une quantité gigantesque de fondations en béton armé en plus des 100+ tonnes de métaux nécessaires juste pour construire les pales de l’éolienne ! Néanmoins une éolienne de cette envergure peut alimenter des milliers de ménages en électricité pendant 25 ans et plus, alors quel bilan ?

impact éolienne

Selon la littérature récente((Inderscience Publishers. « Wind turbine payback: Environmental lifecycle assessment of 2-megawatt wind turbines. » ScienceDaily. ScienceDaily, 16 June 2014. <www.sciencedaily.com/releases/2014/06/140616093317.htm>.)), le retour énergétique et environnemental serait inférieur ou égal à seulement 6 à 12 mois ! Globalement, plus une éolienne sera grande et/ou exposée au vent, plus son retour énergétique, environnemental mais aussi économique sera court.

En règle générale, en fonction de ses dimensions, une éolienne produira 15 à 50 fois plus d’énergie qu’elle n’en aura consommée sur son cycle de vie (de la fabrication ± 80 %, au recyclage (± 10 %), en passant par les entretiens ± 10 %).

Si un repowering est toujours possible, un jour viendra, après 20 à 30 ans, où il faudra songer à démonter l’éolienne et la recycler. Sur base d’une étude danoise((Elsam Engineering, « Life Cycle Assessment of offshore and onshore sited wind farms », Fredericia (Danemark), March 2004)) souvent citée en référence, il apparait que plus de 90-95 % de la masse composant une éolienne (hors fondation) est recyclable. Les études plus pessimistes descendent jusqu’à 80 % mais elles prennent en réalité compte des fondations qui ne seraient recyclées/réutilisées qu’à hauteur de 60-65 % pour le béton et 0% pour les sables et les graviers(( Andersen, P. D., Bonou, A., Beauson, J., & Brøndsted, P. (2014). Recycling of wind turbines. In H. Hvidtfeldt Larsen, & L. Sønderberg Petersen (Eds.), DTU International Energy Report 2014: Wind energy — drivers and barriers for higher shares of wind in the global power generation mix (pp. 91-97). Technical University of Denmark (DTU).)). Dans certains cas, les fondations (responsables de 15-20% de l’impact pour les éoliennes onshore et 30-35 % de l’impact des éoliennes offshore) pourront resservir de base à une nouvelle éolienne !

Ressources du vent et éoliennes

Ressources du vent et éoliennes

Photographie issue de la banque d’images de la Région wallonne.


Généralités

Une éolienne convertit l’énergie cinétique du vent en travail moteur, qui, sauf exception, sera converti en électricité. Pour assurer la rentabilité de l’implantation d’une éolienne, il est nécessaire de pouvoir évaluer le potentiel de vent dont on dispose sur un site particulier. Il s’agit, in fine, de l’énergie de base sans laquelle le projet n’aura pas de sens.

Dans la section sur rendement des éoliennes, les concepts de puissance instantanée du vent, l’énergie du vent ainsi que la distribution du vent ont été introduits. Dans cette page, nous allons voir comment ces notions indispensables à l’évaluation du rendement et des performances d’une éolienne sont reliées à l’évaluation des ressources du vent (ou potentiel de vent).

L’objectif n’est pas de donner un petit cours sur le vent, ses origines et les différents types de phénomènes météorologiques rencontrés. Il est plus prudent de s’en référer à la littérature ou à des sites spécialisés dans ce domaine. En effet, la physique rencontrée est complexe, il nous semble dangereux de simplifier les propos (seuls des spécialistes en météorologie semblent compétents pour réaliser une telle tâche). Par contre, nous allons plutôt nous focaliser sur l’interface entre notre éolienne et le vent, en d’autres termes, introduire des aspects spécifiques du vent qui sont en relation directe avec une exploitation efficace d’une éolienne.


Propriété du vent : continuité dans le temps et l’espace

C’est un titre un peu pompeux. Le message à faire passer est relativement simple, mais très important : pour comprendre le potentiel et le comportement du vent en un point donné du globe, en l’occurrence à l’endroit où vous voulez implanter une éolienne, vous devez tenir compte de phénomènes physiques à la fois locaux et globaux (au niveau de l’espace), à la fois courts et de plusieurs années (au niveau de l’échelle de temps). Le comportement de votre vent sur votre site dépend de l’interaction de phénomènes à des échelles de plusieurs milliers de kilomètres à quelques mètres, à des échelles de quelques années à quelques secondes. C’est ce qui rend l’étude du vent et la météorologie extrêmement complexe. Il suffit de suivre les prévisions météo sur plusieurs  jours et de les comparer à la réalité pour s’en convaincre. Tenter de comprendre le vent uniquement sur base de phénomènes locaux ou uniquement globaux aboutit inéluctablement à des erreurs significatives. Il en va de même pour l’évolution dans le temps.

Par conséquent, il est difficile d’évaluer le potentiel. Le nombre de méthodes pour y arriver est relativement limité.

Potentiel du vent : mesure in situ

La méthode la plus sûre est de simplement réaliser des mesures de la vitesse du vent « in situ ». On insiste bien sur le terme « in situ ». Il s’agit bien de vérifier localement ce qui se passe et pas de tenir compte d’une station météorologique voisine. Dans le cas des mesures, on constate et on analyse le potentiel de vent dont on dispose. Il n’est même pas question de comprendre les phénomènes physiques qui sont à la base de ce comportement. À noter que ces mesures se font en haut d’un mât qui est à une hauteur représentative de la future éolienne, au moyen d’un anémomètre.

Potentiel du vent : simulations par logiciel

On peut réaliser des simulations au moyen d’ordinateurs qui permettent de calculer des modèles atmosphériques. Il s’agit d’une approche complexe réservée à des spécialistes.  C’est pourquoi cette tâche est souvent sous-traitée. Néanmoins, il faut savoir que ces méthodes tiennent compte à la fois des phénomènes globaux et locaux (parfois jusqu’à 100-250 m) pour évaluer le potentiel du vent pour un site donné. Pour compléter l’analyse, il reste des phénomènes encore plus localisés (inférieurs à 100-250 m) qu’il faut intégrer de manière indépendante. De même, le comportement est modélisé sur une base de temps de quelques minutes pour accumuler plusieurs années. Attention, il s’agit du temps du modèle. En réalité, ces simulations par ordinateurs ne prennent que quelques minutes voire quelques heures pour les plus précises. Cela montre tout l’intérêt : on peut connaître en quelques heures ce qui va se passer en moyenne sur plusieurs années. On peut citer la société wallonne ouverture d'une nouvelle fenêtre ! ATM-PRO située à Nivelles qui s’est spécialisée dans les logiciels environnementaux, notamment pour évaluer le potentiel de vent.

Les échelles de temps

Le vent en un point donné est sujet à des fluctuations dans le temps. Ces variations peuvent avoir plusieurs échelles. Il peut s’agir de fluctuations de quelques secondes, comme des bourrasques, de variations de quelques minutes ou le long de la journée, de fluctuations induites par l’alternance jour-nuit, par les saisons voire des variations de comportement entre les années. En outre, dans ces considérations, on n’a même pas encore parlé des fluctuations de vitesses induites par la turbulence.

Par avoir une évaluation fiable de la vitesse moyenne ainsi que sa variance en un point, il faut compter une dizaine d’années de mesure. Bien évidemment, on ne dispose pas toujours d’un intervalle de mesure aussi long. De plus, pour valider le potentiel d’un site, on n’a souvent pas envie d’attendre si longtemps. Il faut alors trouver une méthode pour pouvoir obtenir le comportement du vent sur base d’une période de mesure beaucoup plus courte. On parle d’un minimum de quelques mois à une année complète. C’est à ce stade que les fonctions de distribution statistiques interviennent. Elles permettent sur base de données lacunaires de reconstruire le comportement global. En fait, derrière cela, on a fait une hypothèse sur l’évolution globale du vent, d’où le nom d’approche « statistique », mais elle semble être bien validée pour nos contrées.

Les échelles d’espace

L’origine du vent vient d’un niveau d’ensoleillement et d’un niveau d’absorption qui varient selon l’endroit du globe. L’équateur est plus chaud que les pôles. Cela génère une différence de pression le long de la surface de la terre qui met les masses d’air en mouvement dans les couches inférieures de l’atmosphère (troposphère). On appelle cela des cellules convectives. On se situe donc à un niveau global de plusieurs centaines voire des milliers de kilomètres.

A coté de ces phénomènes globaux, les propriétés géographiques locales sont susceptibles de générer des variations par rapport aux mouvements globaux. Ces variations interviennent sur des échelles de plusieurs centaines de kilomètres à quelques dizaines de mètres. In fine, on trouve des variations très localisées, comme la présence d’un bâtiment isolé qui influence l’écoulement dans son voisinage, mais qui seul ne modifie pas la topologie de l’écoulement dans sa région.

On rencontre parfois des atlas de potentiel de vent qui donnent la vitesse de vent à divers endroits du globe, voire sur une région donnée. Ces atlas ne tiennent pas compte des particularités locales (c’est-à-dire d’obstacles comme des immeubles et du relief local). Ils donnent une bonne idée du potentiel d’une région ou d’une zone, ce qui peut être intéressant pour la mise en œuvre d’une politique globale concernant l’éolien dans la région concernée. Néanmoins, les atlas ne permettent pas la sélection d’un site particulier pour l’implantation d’une éolienne. Comme évoqué ci-dessus, c’est dû au fait que la méthode ne tient pas compte de spécificités locales, spécificités qui ont un impact majeur sur le potentiel du vent. En conclusion, on verra les atlas comme de bons indicateurs globaux. Avoir un bon niveau de vent dans un atlas est plutôt une condition nécessaire que suffisante.

À titre d’illustration, une vue globale de l’atlas européen des vents développé par le laboratoire national danois RISO. Il considère cinq niveaux de ressource différents définis en fonction de la vitesse moyenne du vent ainsi que le type de topographie.


Influence du terrain

On met l’accent sur des caractéristiques plutôt localisées (de quelques mètres à quelques kilomètres) dans la mesure où ce sont des éléments qui peuvent être pris en compte lors de la conception d’un projet éolien. En effet, au-delà d’une certaine échelle de vent, les actions possibles qui peuvent être entreprises par un concepteur n’ont aucune influence sur ces grande échelles alors qu’il peut faire des choix d’emplacement sur un site en fonction de caractéristiques locales du vent pour optimiser son implantation.

Distinction entre terrains plat et non plat

Illustration du concept de terrain plat et non plat.

Un terrain est non-plat quand les effets du terrain sur l’écoulement de l’air sont significatifs. On peut prendre l’exemple d’une colline ou d’une vallée. À l’opposé, le terrain est considéré comme plat quand il contient de petites irrégularités (par exemple, des haies). Il est difficile d’établir une règle précise pour différencier les deux types de terrain. Voici une proposition rencontrée dans la littérature :

  • Le rapport maximum entre la hauteur d’une irrégularité et sa longueur ne peut dépasser 1/50 dans un rayon de 4 km en aval de l’éolienne. En gros, cela favorise les collines à faible pente.
  • Le point le plus bas du rotor doit être au moins trois fois plus haut que la plus haute irrégularité sur le terrain dans un rayon de 4 km en aval de l’éolienne.

Écoulement sur un terrain plat avec des obstacles

Illustration de la zone d’influence sur l’écoulement d’un obstacle.

Il peut s’agir d’obstacles naturels comme une rangée d’arbres ou des haies, voire d’obstacles érigés par l’homme comme un ou des immeubles.
Un obstacle est un objet :

  • dont la zone d’influence sur l’écoulement (en d’autres termes, la région qu’il perturbe) rentre en contact avec l’éolienne. La figure ci-dessus décrit la forme caractéristique de cette région d’écoulement fortement perturbé ainsi que ses longueurs typiques. On voit que l’écoulement est perturbé sur une vingtaine de fois la hauteur de l’obstacle en aval, mais l’objet perturbe aussi le vent en amont. À noter aussi que la zone perturbée se développe à une hauteur typiquement deux fois plus importante que l’obstacle. Dans cette zone, le vent est fortement fluctuant, tant en amplitude qu’en direction. Dans la mesure du possible, il est souhaitable de placer son éolienne à l’extérieur de la zone d’influence d’un objet.

En fait, sur base de cette définition, un obstacle est un objet capable de perturber significativement l’écoulement qui va venir rencontrer le rotor de l’éolienne. Il y a  bien deux conditions, une sur la longueur, une autre sur la hauteur. Premièrement, la zone d’influence de l’objet sur l’écoulement peut atteindre l’éolienne. Par exemple, si un petit immeuble isolé se trouve à plusieurs centaines de mètres d’une grande éolienne, il n’aura guère d’influence sur la nature du vent que le rotor de cette éolienne rencontrera. Il est trop loin.  Deuxièmement, l’obstacle doit avoir une hauteur comparable à la taille de l’éolienne. Imaginons un homme ou un tracteur se déplaçant sur le terrain d’une grande éolienne, on comprend rapidement que cela n’aura pas d’influence sur le comportement aérodynamique de l’éolienne.

Écoulement sur un terrain non plat avec de petites caractéristiques

Lorsque l’on se trouve sur un terrain non plat, on a des effets d’accélération et de décélération. Il faut donc veiller à placer l’éolienne dans une zone d’accélération par rapport à la direction dominante du vent.


La vitesse et la hauteur

Lorsque l’on réalise une mesure de la vitesse du vent, il faut toujours indiquer à quelle hauteur au-dessus du sol cette mesure a été effectuée. Imaginons que vous essayez d’estimer le potentiel éolien existant sur un terrain donné, plus particulièrement à un emplacement donné de ce terrain. Vous réalisez une campagne de mesure durant laquelle vous placez un mât de mesure qui fait 20 m de hauteur. Et bien, les vitesses de vent que vous allez rencontrer à cette hauteur sont différentes de ce que vous mesureriez à 30 ou 50 m.

Cette caractéristique est assez importante dans la mesure où, en début de projet, vous ne connaissez pas encore la hauteur du mât à laquelle vous allez placer votre éolienne. Du coup, vous ne savez pas à quelle hauteur il y a lieu de réaliser votre mesure. En fait, c’est exactement la situation opposée : vous réalisez une campagne de mesure pour savoir à quelle hauteur vous devez placer votre éolienne.

Quel phénomène physique se cache derrière tout cela ? Dans le jargon de la mécanique des fluides, on appelle ce phénomène une couche limite. Parler de ce phénomène est relativement complexe et lourd, c’est pourquoi nous allons simplifier grandement son explication pour introduire les conclusions d’intérêt pour notre développement.

Si l’on se place à une certaine hauteur au-dessus du sol, le vent possède une certaine vitesse que nous appellerons Vr (pour vitesse de référence). Au niveau sol, c’est-à-dire l’air qui touche le sol, la vitesse du vent est nulle. Ce phénomène est induit par la viscosité de l’air. La vitesse du vent va donc progresser de zéro au niveau du sol à la vitesse Vr que nous avons mesurée à une certaine hauteur.  Cette progression entre ces deux vitesses se fera de manière plus ou moins régulière, avec des augmentations voire des diminutions locales de vitesse, suivant l’historique du vent, c’est-à-dire les obstacles que le vent a rencontrés avant d’arriver au point que l’on analyse ainsi que les modifications qu’il a subies.  En outre, la rugosité du sol a une influence sur l’évolution de la vitesse en fonction de la hauteur. En d’autres termes, la vitesse ne progresse pas de la même manière suivant que le sol soit en gazon ou recouvert de plantations. On pourrait croire que c’est complètement farfelu, voire improbable, mais il est possible de la justifier physiquement, ce que nous ne ferons pas, et l’expérience le prouve clairement.

L’évolution peut être très complexe et, de manière générale, il n’existe aucune méthode simple pour pouvoir prédire cette évolution de la vitesse en fonction de la hauteur. Si on ne peut extrapoler la vitesse mesurée à une autre altitude, il faut alors réaliser la mesure à une hauteur proche de ce que sera la future éolienne.

Heureusement, le comportement du vent se simplifie un peu dans certains cas particuliers. Et c’est souvent dans ces configurations particulières que l’on placera une éolienne. Du coup, des solutions pour déduire le vent à différentes hauteurs existent.

Terrains plats et homogènes : les lois de puissance

Lorsque le sol ne présente pas de variations de relief importantes comparées à la hauteur de la future éolienne et ce, dans un rayon de plusieurs dizaines de fois cette hauteur, on peut qualifier ce terrain de « plat« . L’évolution de la vitesse de vent au voisinage du sol évoluera de manière relativement lente et progressive au fur et à mesure que le vent parcourt le terrain.

Cette évolution restera progressive si la couverture de sol, essentiellement sa rugosité, n’évolue pas dans cette zone de rayon de plusieurs dizaines de fois la hauteur. On dira que le terrain est « homogène« .

Si l’éolienne se situe sur un terrain plat, homogène et sans obstacle alors le vent évolue de manière progressive sans être perturbé. Il rentre alors dans un régime plus standard dans lequel des lois permettent de déduire l’évolution de la vitesse en fonction de la hauteur. Et encore, il ne s’agit pas de n’importe quelle vitesse, mais d’une vitesse moyenne. Cette moyenne n’a rien avoir avec les moyennes introduites aux sections précédentes qui se réalisaient sur des périodes de plusieurs mois voire un an. Il s’agit maintenant de considérer des moyennes sur des échelles de temps de quelques minutes. En effet, le vent est de nature turbulente si bien que la vitesse fluctue de manière continuelle autour d’une certaine moyenne.  De manière très simplifiée, on peut dire que la turbulence ajoute un certain bruit de fond à l’évolution temporelle de la vitesse. Ce que les lois simplifiées proposent d’évaluer ici est l’évolution de la moyenne de la vitesse (où les fluctuations induites par la turbulence ont été filtrées) en fonction de la hauteur au dessus du sol. On peut illustrer cette distinction avec les deux figures ci-dessous, la première montrant un champ instantané et la seconde la moyenne.

     

Comparaison entre la visualisation expérimentale d’une couche limite turbulente comprenant un grand nombre de fluctuations (première figure) et l’évolution de la vitesse moyenne en fonction la hauteur (seconde figure). Les règles que l’on donne ici concernent uniquement l’évolution de la vitesse moyenne avec la hauteur pour les terrains plats, homogènes et sans obstacles.

La plus connue est la loi de puissance. Son fondement théorique est souvent mis en question, mais cette approche s’avère souvent utile sur le terrain ou dans les applications de l’ingénieur. Si on mesure à la hauteur de référence, hr, une vitesse, Vr, on peut déduire la vitesse V(h) rencontrée à une autre hauteur, h :

V(h) = Vr*(h/hr)α,

le seul paramètre à fixer étant le coefficient « α », dit coefficient de cisaillement. En fait, celui-ci dépend essentiellement de la rugosité du sol (ou de la couverture du sol si vous préférez) :

Terrain Exposant de cisaillement du vent, α
Glace 0.07
Neige sur terrain plat 0.09
Mer calme 0.09
Gazon coupé 0.14
Gazon court type prairie 0.16
Gazon long type cultures céréales 0.19
Haies 0.21
Arbres et haies clairsemés 0.24
Arbres et haies plus denses 0.29
Banlieue 0.31
Forêt 0.43

Exposant de cisaillement du vent en fonction de la rugosité du sol (pour une hauteur de référence de 10 m).

Puissance du vent et hauteur

Prenons pour exemple un terrain avec du gazon coupé caractérisé par un coefficient « α » de 0.14. Si on réalise une mesure, une vitesse de 5 m/s à une hauteur de 10 m, alors la vitesse du vent à 20 m sera de 5*(20/10)0.14 soit de 5.5 m/s, une augmentation de 10 %. Comme on sait que la puissance du vent dépend du cube de la vitesse, on a Pv(h) = Pv(hr)*(h/hr). La puissance aura, elle, augmenté de 34 %. Si on augmente la hauteur du mât d’un facteur 5, c’est-à-dire en le plaçant à 50 m, alors la vitesse augmente de 25 % et la puissance du vent double. Cela met clairement en évidence que la hauteur du mât à une très grande importance. Il faut toujours placer son éolienne suffisamment haut, dans le cas contraire, on risque d’avoir des rendements déplorables. Pour les petites éoliennes domestiques, une hauteur de 10m est un minimum.

Obstacle ou rugosité ?

Pour conclure cette section, il faut être prudent dans l’emploi d’un tel tableau et de la loi de puissance associée. En effet, le lecteur attentif aura remarqué que l’on a considéré des haies ou les arbres comme étant des obstacles, mais aussi dans le tableau ci-dessus comme étant simplement de la rugosité du sol. Finalement, quand faut-il considérer un objet comme de la rugosité ou comme un obstacle ? En fait, comme évoqué plus haut, un obstacle doit avoir une taille comparable à l’éolienne tandis que la rugosité doit être composée d’une multitude d’éléments petits par rapport à la taille de l’éolienne (pouvant être considérés comme étant des aspérités du sol). À titre d’exemple, si on place une éolienne dans une clairière entourée de forêt, les arbres sont des obstacles pour une petite éolienne et sont des éléments de rugosité pour une grande éolienne commerciale.

Couche limite et charge sur le rotor

Nous avons mis en évidence que la vitesse augmente avec la hauteur par rapport au sol. Cela a un impact évident sur l’énergie du vent qui sera récupérée par l’éolienne. On ne le répétera jamais assez, mais il faut que celle-ci soit placée suffisamment haut pour assurer la rentabilité, la viabilité du projet. Le choix de la hauteur de mât est donc de première importance.

Illustration d’un chargement asymétrique sur le rotor par le vent.

Un autre aspect lié à l’évolution de la vitesse avec la hauteur est la charge aérodynamique sur le rotor. Si l’on place le rotor de l’éolienne trop bas, il recevra comme annoncé un vent plus faible, mais cette vitesse risque en plus de varier significativement le long du rotor. En d’autres termes, les forces exercées par le vent seront plus importantes sur les pales pointées sur le haut que sur les pales pointées vers le bas. Du coup, le rotor est soumis à une contrainte mécanique de nature asymétrique (différence haut-bas) et fluctuante (le rotor passe de la position basse à la position haute). Ces contraintes ont un impact négatif sur la durée de vie du matériel.

Aérodynamique des éoliennes

Aérodynamique des éoliennes

Il s’agit d’une page qui peut s’avérer assez technique pour les personnes qui n’ont pas de base en physique ou en ingénierie. Néanmoins, cette page n’est pas absolument nécessaire à une compréhension d’ensemble du fonctionnement d’une éolienne. En effet, en pratique, il n’est pas obligatoire de comprendre les phénomènes physiques exacts qui rentrent en jeu, à partir du moment où l’on sait ce que l’on peut récupérer comme puissance et énergie électrique de la part de son éolienne. Néanmoins, afin d’être complet et de permettre aux personnes intéressées d’avoir une vue plus pointue ou complète, les bases de l’aérodynamique des éoliennes sont introduites ci-dessous.

La portance et la trainée

Pour comprendre le mode de fonctionnement d’une éolienne, il faut introduire quelques concepts d’aérodynamique. Parmi ceux-ci, les notions de trainée et de portance jouent un rôle majeur. Pour commencer, on simplifie le problème. En effet, lorsque l’on regarde une aile, qu’il s’agisse d’une aile d’avion ou d’éolienne, il s’agit d’un corps à 3 dimensions spatiales. En effet, une aile possède une certaine longueur de corde (direction « x »), une certaine cambrure (direction « y ») ainsi qu’une certaine envergure (direction « z »). De manière générale, il est assez difficile de considérer ces trois dimensions simultanément. On prend uniquement les deux dimensions (2-D) qui contiennent le phénomène physique dominant. Il s’agit de la dimension de la cambrure et de la corde. Ensuite, les aérodynamiciens intégreront la troisième dimension, c’est-à-dire l’envergure, comme étant une superposition de comportements en deux dimensions (2D) le long de l’envergure.

   

À droite, illustration du concept d’aile en trois dimensions avec une cambrure (direction »y »), une envergure L (direction « z ») et une corde (direction « x »).  Le profil d’aile (surface grisée) est obtenu en « découpant » une section de l’aile en un point le long de l’envergure. À droite, vue de profil d’une pale d’éolienne qui donne un bon aperçu d’un profil d’aile. Ici, il s’agit du profil en bout d’aile.

On analyse donc les phénomènes physiques au moyen de profils 2D d’aile. Ce profil est constitué, d’une part, d’un bord d’attaque et d’un bord de fuite, et d’autre part, d’une corde qui relie ces deux extrémités (voir figures ci-dessous). Dans le cas d’une aile complète en trois dimensions, la corde, c, varie généralement en fonction de la position de long de l’envergure. En outre, la forme du profil peut varier avec cette distance. C’est souvent le cas pour les grandes éoliennes dans la mesure où la vitesse du rotor près du moyeu est nettement plus faible qu’en bout de pale. Il n’est pas nécessaire de tenir compte de cette propriété pour comprendre le principe de fonctionnement d’une éolienne voire d’un avion.

Notre profil d’aile est placé dans un écoulement, par exemple, on place le profil au centre d’une soufflerie. L’air présente une certaine vitesse, V, mesurée loin devant le bord d’attaque. En effet, les vitesses que prend l’air autour d’une éolienne sont toujours inférieures à la vitesse du son. On dit qu’elles sont subsoniques. Dans ce cas, les informations peuvent remonter le courant parce qu’elles se propagent plus vite. En fait, l’information se déplace sous forme d’ondes de pression qui ont cette vitesse du son. Du coup, si l’écoulement est subsonique, l’information peut atteindre toutes les directions de l’espace. En pratique, qu’est-ce que cela veut bien dire ? Et bien tout simplement que l’air est déjà perturbé par la présence d’un avion ou d’une éolienne avant même de l’avoir touché. Autre exemple, lorsque vous soufflez sur votre doigt, l’air est perturbé par la présence de votre doigt avant même de l’atteindre. Cela se traduit par des trajectoires courbes des filets de courant (en gros, il s’agit de la trajectoire du fluide). On voit clairement dans les figures suivantes qu’ils sont déviés bien avant d’avoir atteint le bord d’attaque. Par conséquent pour avoir une bonne idée de la vitesse à laquelle on soumet notre profil, il faut le mesurer bien loin devant le bord d’attaque, suffisamment loin pour qu’il ne soit pas perturbé par la présence du profil. Dans le jargon de l’aérodynamique, on parle de vitesse infini amont.

   

Retournons à notre profil d’aile placé dans une soufflerie. De manière générale, la corde présente un certain angle avec la vitesse de l’air en amont, V. Cet angle s’appelle l’angle d’attaque (AOA pour « angle of attack »). Plus cet angle est important, plus les filets d’air sont déviés par le profil. En d’autres termes, la présence de l’aile réorganise localement l’écoulement de l’air (autour du profil). La partie du profil entre le bord d’attaque et de fuite orientée vers le haut est appelée, extrados, tandis que l’autre moitié orientée vers le bas est appelée, intrados. Du côté de l’extrados, l’aile a fait accélérer l’écoulement. Par contre, elle a ralenti l’écoulement côté intrados. La physique nous apprend qu’une telle accélération est accompagnée d’une diminution de pression alors que la décélération engendre une augmentation de la pression. Comme la pression est différente au-dessus et en dessous de l’aile, les forces de pression sur l’aile ne sont pas identiques au-dessus et en dessous. Il en résulte une force globalement orientée vers le haut. C’est cette force qui permet aux oiseaux ou aux avions de voler. Elle est d’autant plus importante que l’angle entre l’axe du profil, c’est-à-dire la corde, et la vitesse de l’air amont, V, est important, ou dit plus brièvement, plus l’angle d’attaque est important. Il y a une limite à ce raisonnement que nous introduirons plus tard (notion de décrochage).

La force sur l’aile peut, comme toute force, se décomposer en plusieurs composantes. Dans notre cas, on considère la composante dans la direction de l’écoulement, la force de trainée (D comme « drag »), et la force dans la direction perpendiculaire à l’écoulement, la force de portance (L comme « lift »).

Illustration des concepts dans le cas d’un avion volant horizontalement à vitesse constante.

Pour illustrer l’ensemble de ces considérations, voyons ce que cela donne dans le cas d’un avion. Supposons qu’il vole en ligne droite à une certaine vitesse constante, V, dans une direction que l’on prend dans un plan horizontal. En fait, supposons que nous nous déplacions à la même vitesse que l’avion. Par définition, nous ne le verrions pas bouger. Par contre l’air qui était au repos avant le passage de l’avion (vu par un observateur situé au sol), acquiert une certaine vitesse, V, si on le regarde à partir de l’avion. De manière plus rigoureuse, on dira que l’on met son repère sur l’avion et que l’on regarde les vitesses relatives à la vitesse de l’avion, V.  Son aile principale présente un certain angle avec la direction de vol, l’angle d’attaque. Il s’ensuit une force de portance verticale et une force de trainée horizontale appliquée à l’aile et donc à l’avion entier. La première permet de vaincre la force de gravité due à la masse de l’avion complet tandis que la seconde freine l’avion :

  • Dans le cas d’un planeur, l’avion n’a pas de moteur. La trainée a donc tendance à ralentir l’avion. Pour pouvoir maintenir sa vitesse et donc continuer à voler dans une atmosphère au repos, il doit toujours descendre progressivement en altitude (notion de taux de chute) pour maintenir sa vitesse. Dans la réalité, on sait que les planeurs tirent profit de mouvements d’air plus globaux au niveau de l’atmosphère. Ces mouvements naturels peuvent générer des vents ascensionnels qui permettent au planeur de prendre de l’altitude. Néanmoins, un planeur aura toujours intérêt à avoir une trainée la plus faible possible. Cette conclusion nous permettra de rebondir plus loin lors de nos explications sur les éoliennes.
  • Dans le cas d’un avion motorisé. La vitesse est maintenue constante grâce à l’action des moteurs. Ils exercent une force de poussée (T comme « thrust ») qui s’oppose à la trainée.

Le décrochage

Dans la section précédente, on a mis en évidence le phénomène physique qui générait la portance et la trainée d’un profil d’aile. On a aussi indiqué que cette force augmentait avec l’angle d’attaque du profil. Comme introduit précédemment, il y a une limite à cette croissance. Nous expliquons maintenant ce phénomène bien connu de décrochage (ou « stall » en anglais).

Courbe de portance en fonction de l’angle d’attaque pour un profil NACA.

Sur base de la courbe ci-dessus qui reprend l’évolution de la portance en fonction de l’angle d’attaque, on voit que cette force augmente progressivement jusqu’à un certain angle au-delà duquel la portance chute brusquement. Ce phénomène est appelé décrochage et l’angle à partir duquel il intervient, l’angle de décrochage. On voit qu’une fois l’angle de décrochage dépassé, les performances aérodynamiques du profil sont nettement dégradées. On imagine assez facilement ce que cela peut engendrer dans le cas d’un avion : une perte de portance brusque risque simplement d’engendrer une chute de l’appareil. A priori, on pourrait croire qu’il est assez farfelu d’introduire un tel phénomène dans le cas des éoliennes, mais comme cela sera expliqué, dans ce domaine d’application, le décrochage est parfois mis à profit pour contrôler la vitesse de rotor.

Explication du phénomène de décrochage

Le lecteur curieux aura peut-être envie d’en savoir un peu plus sur le principe du décrochage. Un élément de réponse simple est donné ci-dessous. Il n’a pas vocation d’être complet ou particulièrement rigoureux. Il cherche plutôt à démystifier le phénomène. Dans le cas d’un profil à angle d’attaque inférieur à la limite de décrochage, les trajectoires du fluide, à savoir l’air, sont infléchies par la présence du profil. Comme expliqué précédemment, on a une accélération côté extrados et une décélération côté intrados, accompagnée d’une diminution et une augmentation de pression, respectivement. Cette différence de pression sur les deux faces du profil est la base de la génération de portance.

   

Différence de la nature de l’écoulement entre un écoulement attaché et décroché.

Lorsque le profil décroche, les angles d’attaques sont trop importants et le fluide ne parvient plus prendre les trajectoires imposées par le profil (fortement incliné). Les trajectoires de fluides ont tendance à rester plus proches de leur situation initiale (avant que l’aile ne passe). Comme il y a moins de déformation de trajectoire, il y a moins d’accélération du fluide côté extrados du profil. Du coup, la dépression est moins importante et, sans surprise, la portance devient moins importante.

Pour augmenter l’angle d’attaque admissible avant de décrocher l’écoulement d’air, un dispositif aérodynamique, un générateur de vortex, peut être installé sur les ailes. Sans entrer dans les détails, ces petits appendices vont permettre de créer des tourbillons contrôlés de manière volontaire. Cette dynamique va plaquer le flux d’air contre la surface de l’aile permettant ainsi d’augmenter l’angle d’attaque admissible avant que la pale ne décroche.


Les forces aérodynamiques sur le rotor d’une éolienne

La première section nous a permis d’introduire les notions nécessaires pour comprendre les phénomènes physiques majeurs qui s’appliquent sur le rotor d’une éolienne. On a introduit la notion de profil d’aile, de corde, d’angle d’incidence ainsi que de trainée et de portance. Lorsque l’on considère une éolienne, le problème se complexifie un peu. En effet, il faut considérer en plus la vitesse de rotation des pales qui, en pratique, est de loin plus élevée comparée à la vitesse du vent. Dans la suite, on fait l’hypothèse d’une éolienne à axe horizontal.

            

Vitesses et forces exercées sur un profil d’une éolienne. On introduit l’angle d’incidence (alpha), de calage (beta) ainsi que la vitesse relative Va dans la figure de gauche. La résultante des forces engendrée par la vitesse du vent et la rotation de l’éolienne est illustrée dans la figure de droite.

Influence de la vitesse de rotation sur l’angle d’attaque et l’intensité de la vitesse

Considérons un profil d’une pale de notre éolienne obtenu en « coupant » l’aile à une certaine hauteur, r, comprise entre le moyeu et l’extrémité de la pale. Vu du haut, cela donne approximativement la figure ci-dessus (à gauche) où la grande flèche noire indique le sens de rotation.  Si l’éolienne a une vitesse de rotation de n (Hz ou tours/seconde), alors à la hauteur du profil, la vitesse tangentielle de la pale induite par la rotation, U, est de

U = n.(2*pi*r) en [m/s],

toujours dans le sens de rotation. On voit clairement que la vitesse augmente proportionnellement avec la hauteur le long de la pale. La vitesse tangentielle maximale sera obtenue en bout d’aile. En plus de la vitesse de rotation, on a toujours la vitesse du vent, V, mesurée loin en amont de l’éolienne. Comme expliqué précédemment, l’écoulement est déjà influencé par la présence de l’éolienne avant d’arriver au niveau du rotor si bien qu’il est partiellement freiné avant d’atteindre celui-ci. En pratique, la vitesse aura idéalement diminué d’un tiers si bien qu’on se retrouvera avec 2/3 de V dans la direction perpendiculaire au plan de rotation, la direction axiale. Comme on l’a fait ci-dessus en considérant un avion, on place notre repère de vitesse sur le profil d’aile. Il faut alors combiner la vitesse de rotation de l’éolienne, U, à cette hauteur, à la vitesse 2/3 V du vent pour obtenir la vitesse du vent relative rencontrée par le profil de l’éolienne, Va. C’est cette vitesse qu’il faut connaître pour pouvoir estimer la force qui sera exercée sur le profil de la pale. En effet, on connaît maintenant la vitesse de l’écoulement (la norme du vecteur Va) mais aussi son angle d’attaque. Comme on l’a introduit ci-dessus, il ne suffit pas de connaître la vitesse du vent, V. La vitesse tangentielle, U, induite par la rotation influence significativement l’écoulement qui sera reçu par le profil.

On introduit un nouvel angle de première importance, l’angle de calage (« pitch angle » en anglais). Il se définit comme étant l’angle entre le plan de rotation et la corde du profil. Contrairement à l’angle d’attaque, il ne dépend pas de conditions de l’écoulement. Il s’agit d’un paramètre géométrique que l’on peut adapter. En effet, l’angle d’attaque dépend des conditions de fonctionnement. Dans le cas de notre éolienne, il dépend de la vitesse du vent, de la vitesse de rotation ainsi que de l’orientation de la corde du profil (autrement dit de l’angle de calage).

Représentation schématique de la variation de l’angle de calage des pales d’une éolienne.

On peut faire varier l’angle de calage en faisant tourner la pale autour de son axe, tel qu’illustré dans la figure ci-dessus. On voit qu’en modifiant cet angle, on modifie l’angle d’attaque et par conséquent la force qui sera exercée sur le rotor. Le pivotement des pales peut être réalisé par des actionneurs électromécaniques ou par un système hydraulique.

Vrillage de l’aile

Comme la vitesse relative, Vr, augmente avec la hauteur de long de la pale, la géométrie de celle-ci est adaptée à cette augmentation de vitesse. On voit notamment la diminution de l’angle de calage avec la hauteur pour garder l’angle d’attaque comparable tout le long de la pale. C’est cette variation qui donne un aspect vrillé à la pale.

Diminution de l’angle de calage avec la hauteur le long de la pale : effet de vrillage. On voit que Vr augmente entre le pied et la tête de la pale. Pour maintenir un angle d’attaque, alpha, constant, l’angle de calage, Theta, est modifié.

Caractéristiques de la force exercée sur le profil d’une éolienne

On voit, dans la deuxième figure sur la décomposition des forces (placée un peu plus haut), que la vitesse relative caractérisée par une certaine intensité et une direction décrite par l’angle d’attaque, induit une force sur le profil. Cette force F, se décompose en une composante tangentielle, FT qui contribue positivement à la rotation de l’éolienne, c’est l’effet utile recherché (du moins pour toutes éoliennes basées sur la portance), et une composante axiale FN perpendiculaire au plan de rotation qui n’a aucun effet utile. Au contraire, cette force axiale soumet l’éolienne par sa poussée à une contrainte mécanique importante. C’est l’élément dominant lors du dimensionnement du mât d’une éolienne. Si on décompose la force aérodynamique selon sa composante de portance et de trainée, on en déduit les propriétés suivantes :

  • La portance L, contribue positivement à la rotation de l’éolienne. En d’autres termes, elle induit une force dans le sens de rotation, c’est l’effet utile recherché. C’est aussi pourquoi on dit que ces éoliennes sont basées sur la portance.
  • La trainée, D, contribue négativement à la rotation de l’éolienne. En d’autres termes, elle induit une force dans le mauvais sens, c’est un effet parasite. Elle diminue le rendement de conversion de l’énergie cinétique du vent en énergie mécanique sur le rotor. C’est pourquoi, tout comme un planeur, les pales d’une éolienne sont conçues pour minimiser la trainée et obtenir ainsi les meilleurs rendements.

Le réglage de la puissance : calage et décrochage

Pour faire fonctionner une éolienne correctement, on doit pouvoir jouer sur les paramètres aérodynamiques des pales pour contrôler la vitesse de rotation ainsi que la puissance soutirée au vent :

  • Dans le cas de vents importants, le rotor peut être soumis à des forces mécaniques qui peuvent dépasser les contraintes admissibles. En outre, la puissance fournie par le rotor est limitée par la puissance maximale de la génératrice.
  • Dans le cas de fonctionnement normal, on doit pouvoir fonctionner à la vitesse de rotation souhaitée ou du moins, prédéfinie.

Il y a deux grandes manières de faire varier, et donc de contrôler, la force aérodynamique sur le rotor d’une éolienne : changer l’angle d’attaque et diminuer la surface au vent balayée par l’éolienne. La deuxième solution s’obtient en décalant le rotor (« yawing » en anglais) par rapport à la direction du vent (selon un axe vertical pour un décalage gauche-droite, ou selon un axe horizontal pour mettre incliner le rotor vers l’horizontal). On s’attardera ici sur la première solution basée sur l’angle d’attaque.

Modification de l’angle d’attaque via l’angle de calage d’une pale

La manière la plus efficace de modifier l’angle d’attaque est de jouer sur l’angle de calage.  Celui-ci peut être modifié en faisant pivoter la pale le long de son axe. Pour contrôler la force appliquée, on peut procéder de deux manières distinctes :

  • On peut augmenter l’angle de calage pour diminuer la puissance ou le réduire pour augmenter cette puissance (« pitch control » en anglais). A la limite si l’on souhaite réduire au maximum les forces exercées sur les pales pour garantir leur intégrité, notamment en présence de grands vents, on peut les placer en drapeau par rapport à la direction du vent (« feathering » en anglais).
  • Une autre manière de limiter la puissance est de dépasser rapidement l’angle de décrochage ce qui induit une diminution significative de la portance (« stall control » en anglais). Hormis pour certaines réalisations, cette seconde méthode est moins efficace que la première. Elle serait apparemment moins précise et les forces appliquées aux pales seraient plus intermittentes (dû au caractère fortement instationnaire du phénomène de décrochage).

Illustration de la variation de la force aérodynamique : diminution par réduction de l’angle de calage (centre) ou par décrochage (droite).


La trainée induite : aile d’envergure finie

Dans les développements précédents, on a essentiellement considéré les phénomènes physiques sur base de profils d’aile. En d’autres termes, on a tenu compte de deux dimensions de l’espace, c’est-à-dire la direction axiale (sens de l’écoulement pour une éolienne à axe horizontal) et tangentielle (plan de rotation). D’un point de vue purement théorique, c’est équivalent à considérer une aile infiniment longue. Pas simple de convaincre le lecteur de cette assertion, mais cela semblera sans doute plus clair par la suite. En réalité, tout le monde sait qu’une aile, que ce soit d’avion ou une pale d’éolienne, n’est pas infiniment grande. Elle a en effet une certaine envergure. Cela peut sembler trivial, mais, comme on va l’expliquer, cette limite va nous obliger à tenir compte de la troisième dimension spatiale dans notre raisonnement. Il s’agit de la direction radiale pour une éolienne à axe horizontal.

Photographie d’un tourbillon de sillage induit par un avion.

Tourbillons de bout d’aile : l’origine du phénomène

Comme on l’a expliqué précédemment en introduisant le phénomène de portance, une aile présente une certaine surpression à l’intrados et dépression à l’extrados. Que se passe-t-il en bout d’aile ? En bout d’aile, on a une région de haute pression (dans le cas d’un avion, en bas) et de basse pression (dans le cas d’un avion, en haut) qui sont voisines et non séparées par l’aile. En conséquence, l’air va se déplacer de la zone haute pression vers la zone basse pression dans un mouvement de contournement du bout d’aile. L’air se met donc globalement en rotation. Il crée un mouvement « cohérent » de rotation que l’on appelle « tourbillon ». Comme, il y a deux extrémités à une aile, on trouve deux tourbillons. Ceux-ci tournent en sens opposés l’un par rapport à l’autre.  Ce phénomène de tourbillon est clairement visible sur la photographie ci-dessus où l’on voit que l’air est mis en rotation au niveau des bouts d’aile après le passage de l’avion. Ce comportement n’a lieu que si l’aile a une certaine envergure. Si elle avait été infiniment grande, on n’aurait pas rencontré ce phénomène. Cela explique la distinction que nous avons introduite en début de section.

Ce phénomène de tourbillon est clairement visible au passage d’un avion à réaction dans un ciel bleu. En effet, la combustion qui a lieu dans un moteur d’avion rejette principalement de l’eau sous forme de vapeur et du CO2. Comme les avions volent à relativement haute altitude, la température de l’air à cette hauteur est largement négative (en °C). Du coup, l’eau qui est éjectée par les moteurs à l’état de vapeur se condense pour former de fins cristaux de glace. C’est la trainée blanche que l’on voit derrière un avion. En effet, l’eau à l’état de vapeur n’est pas visible. Par contre, une fois condensée, elle interagit avec la lumière. Revenons à nos moutons en ce qui concerne les deux tourbillons de bout d’aile. L’eau rejetée par les moteurs est capturée par les deux tourbillons de bout d’aile (phénomène dit d’ « enroulement »). Par conséquent, cela rend ces deux tourbillons visibles (parce que l’eau dans un état visible est capturée par les tourbillons). Ce sont les deux longues trainées blanches que vous voyez par ciel bleu derrière un avion de ligne. Vous remarquerez que, même si l’avion à quatre moteurs, in fine, il reste toujours deux trainées. Cela montre bien que les deux tourbillons capturent le « panache » des moteurs.

On peut se rendre compte que le même phénomène a bien lieu dans le cas d’éolienne. La figure suivante montre l’émission d’un tourbillon en bout de pale qui est translaté en aval par le vent.

 

Visualisation par dégagement d’un traceur (fumée) du sillage d’une éolienne expérimentale bi-pale.

Tourbillons de bout d’aile : augmentation de la trainée

Le phénomène de tourbillon de bout d’aile génère quelques problèmes. Nous retiendrons uniquement ici la contribution à la trainée. En effet, les tourbillons génèrent un mouvement de l’air global vers le bas juste en aval de l’aile. Ce mouvement induit par les tourbillons modifie les angles d’attaque des ailes si bien que la force est décalée vers l’arrière, augmentant ainsi la trainée. La contribution de la trainée induite est non négligeable, surtout à basse vitesse (ce qui est le cas des éoliennes). Du coup, il faut chercher à minimiser ces tourbillons de bout d’aile.

Vue de la composante verticale du champ de vitesse derrière un avion.

Retenons simplement que la forme de l’aile à une importance majeure. Un paramètre de première importance est l’allongement relatif qui est le rapport entre l’envergure et la corde moyenne d’une aile (ou d’une pale). Plus ce rapport est grand et plus la trainée induite est faible. C’est typiquement la raison pour laquelle les planeurs ont de grandes ailes allongées. En effet, ils n’ont pas de moteur si bien qu’ils sont conçus pour minimiser la trainée. En outre, ils volent à basse vitesse si bien que la trainée induite est non négligeable. En ce qui nous concerne, c’est une des raisons qui permettent d’expliquer pourquoi les éoliennes ont des pales si allongées.

 photo avion.     Photo éolienne.

Pour réduire la traînée induite par les tourbillons de bout d’ailes, le monde éolien s’est inspiré de l’aéronautique. Le monde de l’aviation et aujourd’hui celui de l’éolien utilisent un dispositif biomimétique : le winglet, sorte de petite cassure perpendiculaire située en bout de pale qui permet d’augmenter l’allongement effectif de l’aile et ainsi de réduire la traînée induite par les vortex de bout de pale.

Schéma principe du winglet.Photo de winglet.

Rendement des éoliennes

Rendement des éoliennes


 

La puissance instantanée du vent

Une éolienne est une machine qui, par définition, transforme l’énergie du vent en énergie mécanique. Pour débuter, il y a lieu de quantifier la source d’énergie dont on dispose, c’est-à-dire l’énergie associée au vent. Si le vent présente une certaine vitesse « V » à un moment donné et traverse une certaine surface « A », la puissance instantanée du vent est donnée par la relation suivante :

Pvent = 1/2 rho*A*V3,

où « rho » est la masse volumique de l’air, qui vaut approximativement 1.2 kg/m³ à 20°C, au niveau de la mer.

Néanmoins, cette relation met clairement en évidence :

  • que la puissance disponible du vent à un instant donné dépend du cube de la vitesse du vent. En conclusion, si vous avez un vent 2 x plus rapide, vous avez 8 x plus de puissance. On comprend dès lors tout l’intérêt de placer des éoliennes dans des sites venteux. Ce n’est donc pas un caprice de technicien puriste, on voit que le potentiel d’énergie dépend fortement de la vitesse du vent. C’est une condition nécessaire et non une option.
  • que la puissance disponible dépend directement de la surface traversée par le vent. Si on la considère équivalente à la surface balayée par le rotor d’une éolienne, la puissance instantanée du vent (telle qu’évaluée par la relation ci-dessus) représente le maximum de puissance disponible que l’éolienne peut convertir. On sait que la surface balayée par une éolienne dépend du rayon de son rotor (π*R²). Du coup, la puissance disponible dépend du carré du rayon de l’éolienne. En conclusion, si vous avez un rotor 2 x plus long, vous avez 4 x plus de puissance.
    [Découvrez ICI >> notre outil de pré dimensionnement éolien]

Diagramme illustrant le rapport entre le diamètre du rotor et la puissance maximale de l’éolienne :
Réalisé à partir des fiches techniques de 62 modèles d’éoliennes récentes

  • que la masse volumique de l’air a une influence sur la puissance disponible. On sait que la masse volumique de l’air dépend de la température, de  l’humidité et de la pression atmosphérique. Suivant ces paramètres, on peut obtenir des variations de 20 % de la masse volumique et donc de la puissance instantanée du vent.
    Ainsi, au niveau de la mer, par – 10 °C un mètre cube d’air pèsera 1,341 kg tandis qu’à 30 °C, il n’en pèsera plus que 1 164 kg.

L’énergie du vent

Connaître la puissance instantanée du vent est une chose, mais ce qui nous intéresse, c’est son énergie. Il y a donc une notion de temps qui va devoir intervenir quelque part. Pour connaître l’énergie du vent sur une période, il faut intégrer sa puissance sur cette même période. La connaissance de la vitesse moyenne du vent n’est pas suffisante, il faut disposer de l’évolution de la vitesse sur la période étudiée et sommer les contributions.

Prenons une période de 24h et comparons trois journées venteuses avec un vent moyen de 6m/s pour chacune mais un profil de distribution différent :

 

Si les vitesses moyennes sont bien les mêmes, le profil de distribution est lui très différent entre ces trois journées. Un simple calcul nous permet d’observer que la quantité d’énergie que le vent aura fournie sur 24h par m² pour chaque profil est drastiquement différente.

  • Jour1 : 24 [h] x 6 [m/s]³ x 1 [m²] x 1,2 [kg/m³] = 6 220 Wh = 6,22 kWh
  • Jour2 : 12 [h] x 12 [m/s]³ x 1 [m²] x 1,2 [kg/m³] = 24 880 Wh = 24,88 kWh
  • Jour3 : 6 [h] x 24 [m/s]³ x 1 [m²] x 1,2 [kg/m³] = 99 530 Wh = 99.53 kWh !!

Nous voyons donc clairement que nous ne pouvons pas moyenner la vitesse du vent et que la distribution du vent est déterminante dans le calcul de l’énergie dispensée par le vent sur une période et une surface données.

Nb : les éoliennes actuelles atteignant leur puissance maximale aux alentours de 10-15 m/s, les vents plus puissants ne seront pas pleinement exploités : l’éolienne sera freinée pour préserver son intégrité.

Explication avec quelques formules

Supposons que l’on dispose de mesures du vent à intervalles réguliers pendant une période de plus ou moins une année. L’intervalle entre chaque mesure est de « dt » secondes et le nombre d’échantillons est de « N » mesures. La durée de la période d’observation, « T », est donc N*dt. On obtient un échantillon de différentes vitesses, U1 jusque UN.  Il est donc possible d’estimer simplement la vitesse moyenne du vent, Um, pendant cette période de mesure :

Um = (1/N)*(U1+U2+ … + UN-1 + UN)

Pour obtenir l’énergie, il faut sommer les contributions des différentes mesures. Si la puissance du vent associée à une mesure de vitesse Ui vaut

Pi = 1/2*rho*A*(Ui)3

L’énergie du vent, Ev, vaut alors : Ev = (P1 + P2 + …. + PN-1 + PN)*dt. En fait, il faut connaître l’évolution de la vitesse du vent durant toute la période étudiée. Si on ne connaissait que la vitesse moyenne du vent, Um, cela ne suffirait pas pour déterminer l’énergie, Ev. En effet, on ne peut pas calculer l’énergie du vent au moyen de la vitesse moyenne (de la manière suivante) :

 Ev n’est pas égal à 1/2*rho*A*(Um)3*T

Cette différence sera chiffrée dans la section suivante et elle est loin d’être négligeable.


La distribution du vent : approche statistique

Dans la section précédente, nous avons intégré les différentes puissances pour obtenir l’énergie du vent sur la période étudiée. Il existe une autre manière de procéder qui présente en outre l’avantage de synthétiser les propriétés du vent sur la période investiguée. Il s’agit de la fonction de distribution du vent, que l’on nommera ici p(V).

Imaginons que l’on s’intéresse aux vitesses prises par le vent. Celles-ci varient entre la valeur zéro et la vitesse maximale rencontrée. On découpe cet intervalle en différentes petites plages de vitesses de largeur dV. Le produit p(V)*dV donne la probabilité que la vitesse du vent aie la valeur V durant la période d’observation (que l’on avait nommée, « T »). Cette valeur oscille entre « 0 » et « 1 ». La valeur est nulle quand le vent n’atteint jamais cette vitesse et la valeur « 1 » quand le vent est toujours à la vitesse V, ce qui, dans la pratique, n’arrive jamais. À titre d’exemple, si la probabilité p(V)*dV que la vitesse soit égale à V est de 0.5, cela veut simplement dire que l’on rencontre la vitesse V la moitié du temps de l’observation. Cela peut paraître assez abstrait, mais il est difficile de passer à côté de ce concept si l’on veut introduire les approches statistiques de l’évaluation de l’énergie du vent.

Une fois cette fonction connue, on peut déterminer la contribution de la vitesse V à l’énergie du vent de la manière suivante :

Ev(V) = 1/2*rho*A*V3*(p(V)*dV*T)

On obtient alors l’énergie du vent en sommant sur les différentes gammes de vitesse rencontrées. En d’autres termes, chaque gamme de vitesses se présente à une certaine fréquence pendant la période étudiée, « T », et correspond à une certaine contribution à l’énergie totale. Pour obtenir l’énergie du vent, il faut tenir compte de toutes les gammes de vitesse rencontrées et de leur contribution.

Comment obtient-on cette fonction de distribution ? La manière la plus consistante est d’utiliser les valeurs mesurées de vitesse et de regarder à quelle fréquence les différentes vitesses sont rencontrées. C’est la situation idéale.

Néanmoins, il arrive que l’on ne dispose pas de ces mesures ou, du moins, on dispose de mesures lacunaires qui ne permettent pas d’établir proprement la fonction de distribution. Par exemple, le potentiel de vent peut varier d’une année à l’autre si bien qu’il faut plusieurs années de mesure pour établir un comportement moyen. La littérature reprend souvent le chiffre de 10 années de mesure. On comprend dès lors qu’une évaluation du potentiel sur une période aussi longue ne soit pas toujours possible. Dans ce cas de figure, on peut faire une hypothèse sur la manière dont les vitesses sont rencontrées dans le temps. Dans le domaine de l’éolien, la fonction la plus courante est la fonction de distribution de Weibull.

Exemples de distributions de Weibull pour différents jeux de paramètres.

La fonction de Weibull est représentée dans le graphe ci-dessus. Elle ne comporte que deux paramètres : le facteur de forme, k, et le facteur d’échelle, c. Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que l’on sait à quelle fréquence sont rencontrées les différentes vitesses de vent, V, durant la période d’observation uniquement si l’on est capable de fixer la valeur de deux coefficients. Le but du jeu est de fixer ces deux coefficients sur base de données lacunaires dont on dispose. En d’autres mots, on est capable de reconstruire l’historique d’intérêt du vent sur la période étudiée uniquement si l’on est capable de fixer les deux paramètres de la fonction de Weibull : notamment sur base de la vitesse moyenne du vent et de sa variance. La qualité de cette méthode est correcte si, effectivement, la distribution du vent a, dans le site étudié, effectivement tendance à suivre une répartition de Weibull. Cela devient une question de spécialiste. On invite le lecteur à se référer à des ouvrages plus approfondis si cette thématique l’intéresse. À noter que l’on entend aussi parler de la fonction de distribution de Rayleigh qui est plus simple dans la mesure où elle ne comporte qu’un seul paramètre (c’est un cas particulier de la fonction de Weibull).

À titre d’exemple, commentons la figure ci-dessus représentant 5 jeux différents de paramètres pour la fonction de distribution de Weibull. On voit par exemple la courbe « rouge » représentant des vents de vitesse moyenne proche de 4.25 et qui oscille largement autour de cette valeur. La courbe « noire » quant à elle représente des vents de vitesse moyenne plus faible (proche de 3.5) et qui ont une variation nettement plus faible (proche de 3m/s) et qui ont une variation nettement plus faible autour de cette moyenne.

En conclusion, les fonctions de distribution du vent peuvent avoir deux utilités. D’une part, elles permettent de synthétiser les propriétés d’intérêt du vent en relation avec la production d’énergie et, d’autre part, si on utilise des fonctions prédéfinies comme la fonction de Weibull, elles permettent d’évaluer l’énergie du vent si on ne dispose que de données lacunaires concernant son évolution sur un site donné. Dans ce dernier cas de figure, il faut être conscient que la qualité de cette méthode est moindre qu’une campagne de mesure sur une dizaine d’années. Au mieux, les résultats auront une valeur identique.

Pourquoi ne pas directement évaluer l’énergie au moyen de la vitesse moyenne ? Ce n’est pas la même chose !

La puissance instantanée du vent est obtenue en prenant le cube de la vitesse. On obtient l’énergie sur la période de mesure en intégrant ces puissances. Mathématiquement parlant, c’est différent d’intégrer la vitesse sur la période puis de la mettre au cube. En d’autres termes, l’ordre dans lequel vous réalisez les opérations d’intégration et mise à la puissance 3 a une importante : on met d’abord la vitesse instantanée au cube puis on somme les différentes contributions durant la période analysée.

Fait-on une grosse erreur si on évalue l’énergie du vent au moyen de la vitesse moyenne ? Oui ! Sur base de cas rencontrés, on peut facilement faire une sous-estimation de 100 % voire plus.

On peut essayer de voir ce que cela donne avec la fonction de distribution de Weibull. Avant de rentrer dans le vif du sujet, on peut d’abord se faire une idée de l’évolution de la vitesse moyenne et de la variance en fonction de l’évolution des deux paramètres de la fonction de Weibull, le paramètre de forme, k, et le paramètre d’échelle, c.

On voit que la vitesse moyenne du vent dépend essentiellement du facteur d’échelle, c. La variance, quant à elle, dépend fortement des deux facteurs. Finalement, on représente maintenant le rapport entre l’énergie du vent calculée avec la fonction de Weibull et l’énergie du vent calculée de façon approximative par la moyenne de la fonction de Weibull. On connaît ce rapport sous le nom de facteur Ke,

Ke = Somme(1/2*rho*A*Ui³/N)/(1/2*rho*A*Um³) = (1/N Somme(Ui³))/(Um³)

   

Conclusion, le rapport, Ke, peut être très important, d’autant plus que le facteur de forme k est faible. On aura noté qu’il dépend uniquement de la valeur de ce facteur k. On reprend ci-dessous, un tableau avec des chiffres :

k Ke
1.2 3.99
2 1.91
3 1.40
5 1.15

Courbe caractéristique de puissance et rendement instantané

Le vent présente donc une certaine énergie pendant une période donnée. Cette énergie est convertie par l’éolienne en énergie mécanique et très certainement en énergie électrique. Cette transformation peut être décomposée en plusieurs étapes :

  1. L’énergie cinétique du vent est convertie en travail moteur à l’axe du rotor. Cette conversion est réalisée avec un certain rendement, le rendement aérodynamique.
  2. Le travail moteur au rotor est transmis vers l’axe de la génératrice avec un certain rendement, le rendement d’accouplement mécanique.
  3. La génératrice transforme le travail moteur à son axe en énergie électrique avec un certain rendement électrique.

Le rendement global est le produit des rendements de ces trois étapes. Il est difficile d’évaluer de manière simple ces trois rendements et donc d’estimer le rendement global. Le plus simple est de mesurer ce qui rentre et ce qui sort de l’éolienne pour avoir une idée de rendement global.

On définit le rendement instantané global d’une éolienne pour une vitesse de vent, V, comme étant le rapport entre la puissance électrique débitée par la génératrice, Pelec, et la puissance instantanée du vent, Pvent :

eta(V) = rendement instantané à la vitesse V = Pelec(V)/Pvent(V),

La puissance instantanée du vent a été définie au début de cette page. Il reste à connaître la puissance électrique débitée par l’éolienne en fonction de la vitesse V tout en sachant que le détail des pertes successives à chaque étape de transformation n’est pas explicité. En outre, si l’on peut connaître la puissance électrique débitée en fonction de la vitesse de vent, on peut évaluer la production électrique annuelle de l’éolienne sur base des mesures du vent réalisées in situ :

 Eelec = (Pelec(V)1 + Pelec(V)2 + … + Pelec(V)N)*dt.

La courbe caractéristique de puissance d’une éolienne donne la puissance électrique en fonction de la vitesse du vent. Généralement, ces courbes sont données par les fabricants d’éoliennes. Dans le cas de grandes éoliennes, la courbe caractéristique a été certifiée par un laboratoire et définie dans des conditions d’essai standard. On a donc une certaine assurance quant aux performances réelles de l’éolienne. La situation est plus critique pour les petites éoliennes produites par de relativement petits constructeurs. En effet, ils fournissent généralement la courbe caractéristique de puissance de leur appareil, mais ils font rarement certifier les performances. On n’a donc aucune ou peu d’assurance quant à la fiabilité des performances annoncées. Dans tous les cas, la certification des performances est un élément à bien garder à l’esprit lors de l’acquisition d’une éolienne, surtout s’il s’agit de concepts novateurs ou « potentiellement » révolutionnaires (pour ne pas dire fumants).

La courbe caractéristique de puissance comporte par trois grands paramètres (voir figure ci-dessous) :

  • La vitesse minimale de démarrage (cut-in wind speed) : il s’agit de la vitesse du vent à partir de laquelle l’éolienne commence à débiter une puissance utile (c’est-à-dire de la puissance électrique).
  • La vitesse maximale ou d’arrêt (cut-off wind speed) : il s’agit de la vitesse maximale acceptable par l’éolienne. Au-delà de celle-ci, la tenue mécanique de ces divers composants n’est plus assurée (ou simplement prévue). Si le vent présente une vitesse supérieure, l’éolienne est mise à l’arrêt, idéalement de manière automatique, pour préserver son intégrité.
  • La puissance nominale (rated power) : cette valeur est souvent égale à la puissance électrique maximale qui peut être extraite de l’éolienne. Elle n’a jamais lieu à la vitesse maximale acceptable du vent. En effet, peu avant d’atteindre la vitesse de mise à l’arrêt, des dispositifs sont mis en place pour freiner la vitesse du rotor (soit de manière dynamique, soit de manière aérodynamique), ce qui peut diminuer significativement les performances de l’éolienne.

En conclusion, on trouve typiquement des courbes de puissance ayant l’allure suivante.

 

Forme typique d’une courbe de puissance d’une éolienne : production électrique finale en kW en fonction de la vitesse instantanée du vent en m/s.

La puissance nominale d’une éolienne ne veut rien dire sur son efficacité si le constructeur ne mentionne pas à quelle vitesse de vent cette puissance électrique est obtenue. En effet, on n’est pas en mesure de déterminer la puissance instantanée du vent et donc d’établir son rendement global instantané.

Exemple : FairWind F64-40

À titre d’exemple, la société wallonne ouverture d'une nouvelle fenêtre ! FairWind établie à Seneffe commercialise des éoliennes à axe vertical dont les courbes de puissance sont disponibles sur leur site internet. En analysant leur modèle F64-40, voici les courbes obtenues :

 

 

Performances de l’éolienne à axe vertical Fairwind F64-40 suivant les données fournies par le constructeur.

On distingue clairement la vitesse minimale de 3 m/s, la vitesse maximale de 20 m/s ainsi que la puissance nominale de 40 kW obtenue à 15 m/s. Un simple calcul montre que le rendement instantané global ne dépasse pas 35 %.

Données générales FairWind F64-40
Puissance nominale (rated power) 40 kW
Vitesse du vent nominale 14 m/s
Vitesse du vent minimale (cut-in speed) 3 m/s
Vitesse de vent maximale (cut-out speed) 20 m/s
Vitesse de mise en sécurité 55 m/s
Diamètre du rotor 8 m
Longueur des pales 8 m
Surface balayée 64 m²
Hauteur du mât [12,24] m

L’estimation de la production d’électricité

Sur base de mesures

Sur base de la mesure du vent réalisée sur une période T et de la courbe caractéristique de puissance de l’éolienne, on peut évaluer la production électrique, Eelec, de l’éolienne durant cette période :

Eelec = (Pelec(V)1 + Pelec(V)2+ Pelec(V)3+ … + Pelec(V)N)*dt,

où on réalise une mesure de la vitesse toute les « dt » secondes, on possède ainsi « N » valeurs dans notre échantillon tel que T = N*dt. En bref, on suppose que la vitesse que l’on a mesurée à un moment, Vi, reste constante pendant tout l’intervalle de mesure, dt. Durant un intervalle, l’éolienne produit Pelec(V)i*dt.  On réalise finalement la somme sur tous les points de mesure pour obtenir l’énergie électrique finale.

Sur base de la distribution statistique

Une autre manière de procéder est de travailler sur base de la distribution statistique dont on connaît les paramètres (sur base de mesures ou de simulations) :

Eelec(V) = Pelec(V)*(p(V)*dV*T),

où, dans le membre de droite, le premier facteur est la puissance électrique produite à la vitesse V et le second facteur est le temps total durant lequel la vitesse est égale à V (pendant la période de mesure, T). L’énergie finale, Eelec, est obtenue en sommant sur toutes les vitesses rencontrées.

Certains constructeurs utilisent cette méthode pour communiquer une estimation de la production électrique annuelle de leur éolienne. En fait, ils fixent les paramètres de la fonction de distribution, p(V), et regardent ce que cela donne au niveau de la production. Quand vous entendez des estimations de la production électrique, il faut être conscient que le constructeur a fait des hypothèses sur la manière dont les vitesses sont rencontrées dans le temps. De manière générale, le vent sur votre site ne sera pas identique à celui qu’il a considéré dans son estimation. Pour être rigoureux, il faut veiller à ce que le constructeur communique ces paramètres. C’est la seule manière de pouvoir comparer différents matériels entre eux sur base d’estimation de la production électrique.

Estimation du rendement moyen global de l’éolienne

On peut aussi connaître le rendement moyen de l’éolienne sur la période d’observation, T. On peut estimer, d’un côté, l’énergie du vent qui était disponible (la source d’énergie), Event, et, d’un autre côté, l’énergie électrique produit par l’éolienne, Eelec (comme calculée ci-dessus). Le rapport de ces deux valeurs donne le rendement moyen :

Rendement moyen global = Eelec/Event,

Par global, on sous-entend que l’on s’intéresse à ce qui rentre et ce qui sort globalement de l’éolienne. On trouve typiquement, un rendement moyen de 20 % pour les petites éoliennes et de 35 % pour les grands modèles.

Nombre d’heures pleines de fonctionnement

La puissance débitée par une éolienne dépend de la vitesse du vent.  Par conséquent, la majorité du temps, l’éolienne ne fonctionne pas à puissance nominale (PN), le vent n’étant généralement pas suffisant pour garantir cela. C’est un des arguments des détracteurs des éoliennes. En effet, comparé à des centrales électriques traditionnelles basées sur les énergies fossiles (typiquement une centrale TGV) ou le nucléaire qui peuvent fonctionner de manière continue proche de leur puissance nominale, une éolienne fonctionnera principalement à une puissance inférieure à PN. Du coup, il faudra une puissance installée supérieure avec des éoliennes qu’avec des centrales classiques pour atteindre une même production d’énergie annuelle. C’est un argument assez controversé bien que techniquement très clair. Le but n’est pas de faire le point sur ce sujet. On reprend juste ici l’argument.

Une manière de chiffrer la production d’une éolienne est de rapporter sa production électrique annuelle en nombre d’heures de fonctionnement à puissance nominale. En d’autres termes, on calcule le nombre d’heures que l’éolienne doit tourner à puissance nominale pour débiter la même production électrique annuelle (avec un vent dont la vitesse varie).

Nombres d’heures équivalentes à puissance nominale = tN = Eelec/PN.

Valeur typique pour les grandes éoliennes en Wallonie : tN = 25% de l’année.

Valeur typique pour le petit éolien en Wallonie  tN = 11% de l’année.

Typiquement, la production annuelle électrique d’une grande éolienne en Wallonie correspond à 25 % du temps à puissance nominale. Il ne faut pas en déduire que l’éolienne ne tourne que 25 % du temps. Non, dès que la vitesse instantanée du vent dépasse la vitesse minimale de mise en fonctionnement (cut-in wind speed), l’éolienne débite de l’électricité.  En fait, les chiffres montrent que l’éolienne fonctionne 80 % du temps (source : ouverture d'une nouvelle fenêtre ! APERe). Néanmoins, elle produit à une puissance généralement inférieure à la puissance nominale, cette dernière étant souvent prise comme étant la puissance maximale.

Estimation rapide : Quick-scan

Dans certaines situations, notamment dans une étude de préfaisabilité, on souhaite pouvoir estimer grossièrement ce qu’un site va pouvoir donner comme production. On peut simplement se baser sur la vitesse moyenne du vent, Um, sur le site :

Estimation de la production = (rendement moyen global)*(1/2*rho*A*(Um)3),

où le rendement moyen est pris :

  • à 22 % pour le petit éolien (moins de 35 m de diamètre) ;
  • 30 % pour l’éolien moyen (35 à 100 m de diamètre) ;
  • et 35 % pour le grand éolien (> 100 m de diamètre).

Dans la réalité, on remarquera une tendance à un meilleur rendement pour les modèles d’éoliennes avec les pales les plus longues (> 30 m) :
Diagramme réalisé sur base de 62 fiches techniques d’éoliennes récentes.

On sait très bien qu’il s’agit d’une estimation limitée étant donné que l’effet des fluctuations de la vitesse autour de la moyenne n’est pas pris en compte. On peut montrer que cette manière d’estimer l’énergie du vent (le deuxième terme dans le membre de droite), est susceptible d’amener de grosses erreurs. On sous-estime le potentiel de vent. Néanmoins, si un constructeur prétend pouvoir produire, pour une vitesse moyenne donnée, une production électrique annuelle dépassant quatre ou cinq fois cette estimation simplifiée, vous pouvez clairement conclure que ce n’est pas une proposition honnête.


La limite de Betz

Le fabricant d’une éolienne doit faire certifier la courbe caractéristique des performances de son modèle. Cela doit être réalisé selon une méthode normalisée, idéalement par un laboratoire indépendant.

Dans la pratique, les modèles de plus faibles puissances ne bénéficient pas de cette certification. Le constructeur peut fournir une courbe de puissance, mais on n’a aucune garantie sur sa fiabilité, tout au plus, on peut se reposer sur la crédibilité du fabricant.

Comment détecter un produit farfelu ? Il n’y a malheureusement pas de méthode absolue (hormis tester le matériel). Néanmoins, certains chiffres communiqués par le constructeur peuvent être mis à l’épreuve. C’est le cas du rendement global instantané de l’éolienne tel que défini à la section précédente.

L’application des principes fondamentaux de la mécanique permet de déterminer la quantité maximale d’énergie du vent qui peut-être convertie en énergie mécanique (rotation du rotor). Ce rendement aérodynamique instantané, ou Coefficient de performance (Cp), ne peut dépasser 16/27 soit approximativement 59 %. Par conséquent, le rendement instantané qui tient aussi compte d’autres pertes (aérodynamiques, accouplement, conversion électrique, auxiliaires) doit être inférieur à cette valeur :

Rendement global instantané < rendement aérodynamique < 16/27

Cette limitation est mieux connue sous le nom de « limite de Betz » ou « théorie de Betz ». Pour arriver à ces conclusions, il a fallu introduire des hypothèses simplificatrices. Néanmoins, celles-ci sont tout à fait raisonnables.


Vitesse en bout d’aile et performance : tip speed ratio

On a vu que la limite de conversion de puissance du vent vers la puissance mécanique du rotor est théoriquement limitée à 16/27, soit 59 %, par l’approche de Betz. Par rapport à ce cas idéal, il existe une série d’imperfections qui empêchent d’atteindre cette limite. En d’autres termes, on a une série de pertes qui réduisent l’efficacité aérodynamique de l’éolienne :

  • Mise en rotation du sillage : Le vent avant de rencontrer l’éolienne ne possède pas de mouvement de rotation prononcé et cohérent. Du moins, c’est le cas s’il ne rencontre pas d’obstacles majeurs en amont de l’éolienne. Une fois que l’air est passé dans le rotor de l’éolienne, il en ressort avec une vitesse de rotation générale dans le sens opposé à celui du rotor. Cette vitesse de rotation qui n’existait pas au départ correspond à une certaine quantité d’énergie cinétique qui n’a pas pu être convertie pas l’éolienne. Il s’agit d’une première source de pertes.
  • Trainée des profils de l’aile : Lorsque l’on place une aile face au vent, il génère une force sur cette aile. C’est l’effet escompté. Cette force peut se décomposer en partie. Une force dite de portance qui est perpendiculaire à la direction du vent en aval de l’aile et une composante dite de trainée qui est parallèle à cette vitesse de vent. Dans le cas d’un avion, c’est la portance qui permet de vaincre la gravité et permet ainsi à l’avion de voler. La trainée freine l’avion, car cette force est opposée à la direction dans laquelle l’avion progresse. Pour permettre à l’avion de conserver cette vitesse, les moteurs de l’avion donnent la force nécessaire pour vaincre cette force de trainée.  Dans le cas d’une éolienne, on retrouve la même idée. Néanmoins, il faut alors tenir compte à la fois de la vitesse du vent, mais aussi de la vitesse de rotation de l’éolienne. Le problème est un peu plus complexe. Tout cela pris en compte, on se rend compte que c’est la portance des pâles de l’éolienne qui exerce une force utile dans le sens de rotation de l’éolienne. La trainée des pâles, par contre, a tendance à freiner la progression de ces pâles. C’est une deuxième source de pertes parce qu’une partie de l’énergie du vent sert à freiner l’éolienne. Fort heureusement, une aile d’éolienne est conçue pour avoir la trainée la plus faible possible pour une portance donnée. En gros, il s’agit d’une question de spécialistes dans la mesure où il s’agit de travailler sur l’aérodynamique de l’aile.
  • Nombre limité de pales : Le nombre de pales d’une éolienne est limité pour des questions de poids et de prix. Le rendement idéal considéré plus haut faisait l’hypothèse d’un nombre très important de pales. Dans la réalité, ce nombre ne sera jamais atteint. Cette limitation est source d’une troisième forme de pertes. D’un point de vue physique, ces pertes sont générées par la trainée induite. La trainée induite est d’autant plus faible que la portance est faible et le rapport entre envergure et corde moyenne de l’aile est important. Ainsi, une aile qui a une grande envergure par rapport à la corde aura une trainée plus faible. On peut s’en convaincre en comparant les ailes d’un planeur à celle d’un avion traditionnel : les ailes du planeur sont beaucoup plus allongées pour limiter la trainée, ce qui est souhaitable étant donné qu’il n’a pas de moteur. C’est une des raisons qui expliquent pourquoi une éolienne a des ailes allongées.

   

Analogie entre l’allongement (aspect ratio) des ailes d’un planeur et des pales d’une éolienne : limitation de la trainée.

Ces explications avaient juste vocation de montrer que le rendement idéal n’était jamais atteint, ceci étant dû à différentes pertes. Un facteur qui influence grandement ces pertes est le rapport entre la vitesse en bout de pale (induite par la rotation) et la vitesse du vent, le tip-speed ratio (TSR) en anglais,

Lambda = tip-speed ratio (TSR) = u/V = n.2*pi*R/V,

avec,

  • u, la vitesse en bout de pale qui peut être évaluée comme étant le produit
  • de la vitesse de rotation, n (en Hz),
  • par le rayon de l’éolienne, R, multiplié par 2*pi.
  • V est la vitesse du vent en amont.

La théorie confirmée par la pratique montre que les pertes sont minimisées pour un TSR donné. En d’autres termes, pour chaque vitesse de vent, il existe une vitesse de rotation qui maximise le rendement aérodynamique de l’éolienne, c’est-à-dire la quantité d’énergie du vent transférée au rotor. On peut s’en rendre compte sur base du la figure ci-dessous,

Évolution du rendement aérodynamique instantané en fonction du rapport entre la vitesse en bout de pale et la vitesse du vent (tip-speed ratio) : illustration des différentes sources de pertes par rapport au rendement idéal de Betz.

On peut comprendre le graphe de la manière suivante :

  1. On dispose au départ de la puissance instantanée du vent par m², ce qui correspond dans le graphe au niveau de 100 %.
  2. La théorie de Betz nous apprend que l’on peut dans le meilleur des cas récupérer jusqu’à 16/27, soit approximativement 60 %.
  3. Si l’éolienne tourne plus lentement pour une vitesse de vent donnée, on aura un couple aérodynamique important pour atteindre une même puissance et donc une forte déviation du fluide par les pales. Cela engendre une mise en rotation plus importante du sillage et donc des pertes plus importantes. On le voit clairement dans le graphe sous la dénomination « pertes de sillage ». En conclusion, plus l’éolienne tourne vite, moins les pertes par mise en rotation sont importantes.
  4. Si on considère un profil d’une pale d’éolienne, la force aérodynamique se décompose en une force de portance, mais aussi de trainée qui s’oppose dans la direction de rotation de l’éolienne (du moins pour les éoliennes dont le principe de fonctionnement est basé sur la portance). L’effet négatif sur le rendement aérodynamique est d’autant plus important que l’éolienne tourne vite. On peut s’en rendre compte dans le graphe ci-dessus sous l’appellation « trainée du profil d’aile » où les pertes augmentent avec le tip-speed ratio. Sur base des deux premiers termes de pertes (pertes de sillage et de trainée de profil), on voit apparaître un premier optimum à une vitesse de relative de bout d’aile entre 6 et 8.
  5. On voit apparaître enfin le dernier terme de perte induit par le nombre limité de pales. En fait, si on prend la courbe relative à un nombre donné de pales en pointillé (on considère ici 1, 2 ou 3 ailes), on voit que la courbe générale correspond à l’enveloppe de tous les maxima des courbes à nombre de pâles fixé.

 

Évolution du rendement aérodynamique en fonction du nombre de pales pour un modèle donné.

Au regard de la courbe ci-dessus, qui reprend l’évolution du rendement aérodynamique en fonction du nombre de pale pour un modèle donné, on voit que plus le nombre de pales est important, plus le rapport optimal de vitesse en bout de pale est faible.

En outre, l’analyse des rendements de 62 modèles récents d’éoliennes démontre qu’il y a  une tendance claire vers un meilleur rendement pour les éoliennes ayant une vitesse de vent nominale plus basse (comprises entre 10 m/s et 12 m/s.

On peut conclure cette section en faisant une description des différentes courbes caractéristiques de rendement aérodynamique pour chaque grand modèle d’éolienne. De manière générale, on voit que les éoliennes basées sur la portance, c’est-à-dire les éoliennes à axe horizontal ou à axe vertical de type Darrieus, ont un rendement aérodynamique supérieur aux éoliennes basées sur la trainée (typiquement, le rotor Savonius). L’influence du nombre de pales sur le rendement est aussi représentée. Si la vitesse de rotation diminue, il faut un couple aérodynamique plus important pour une même puissance mécanique. C’est pourquoi les éoliennes qui cherchent à produire du travail mécanique, notamment pour des applications de pompage, ont un nombre de pales important (illustré ci-dessous par l’éolienne américaine). Actuellement, les éoliennes de type Darrieus ont un rendement un peu supérieur à celui présenté dans le graphe ci-dessous.

Évolution typique du rendement aérodynamique en fonction du tip-speed ratio et du modèle d’éolienne.