Le chauffage de proximité en test à l’UCLouvain

Une expérience pilote((Lire le détail sur : https://dial.uclouvain.be/pr/boreal/fr/object/boreal%3A275611/datastreams)) de dispositifs de chauffage de proximité s’est tenue dans bureaux de la faculté LOCI et de l’institut LAB de l’UCLouvain, en décembre et janvier 2023. L’objectif est de démontrer qu’il est possible de maintenir la satisfaction des occupants tout en abaissant les températures intérieures des espaces de travail, grâce à l’utilisation de systèmes de correction thermique individuels. Cette expérience s’inspire bien entendu de la démarche Slowheat.


Démarche

L’expérience fait appel à des volontaires, qui reçoivent un « kit » de solutions chauffantes. En échange, ils s’engagent à chercher à moduler la température de leur bureau (a priori à la baisse) jusqu’à trouver leur point d’équilibre. Ont répondu à l’appel 34 personnes (24 femmes pour 10 hommes), certains disposant de leur propre bureau, d’autres partageant un même espace.

Le matériel suivant a été proposé aux participants:

  • Un chauffe-main de 115 Watt
  • Un dossier de chaise chauffant de 60 Watt
  • Un panneau chauffe pied de 85 Watt

La sélection du matériel s’est basée, principalement, sur la disponibilité, le coût, et le présence d’un moyen de contrôle dans le temps de l’apport de chaleur (auto-stop), de façon à limiter les risques de surconsommation d’énergie.


Températures d’ambiance

Des enregistreurs de température ont été placés dans les bureaux des participants. Les résultats présentés ici ne couvrent que les heures d’occupation. Dans la moitié des locaux environ, les relevés montrent une température sensiblement inférieure à la cible institutionnelle de 19°C. Dans l’autre moitié, les températures sont relativement proche de cette cible. Selon les déclarations des participants dans les locaux les plus froid, cette chute de température est bien due à leur action sur les vannes thermostatiques. Il sont plusieurs à avoir complètement coupé le chauffage. Notons cependant que les locaux adjacents, couloirs, etc… restaient chauffés, ce qui assure une apport thermique de base.

Distribution des températures intérieures entre le 1 décembre et le 20 janvier, en période d’occupation,
dans les différents bureaux des participants.


Confort thermique

Des questionnaires remplis à intervalles réguliers permettent d’avoir une idée de la satisfaction des participants. Ceux-ci montrent pendant l’expérience une perception de l’ambiance plus centrée sur la neutralité (« ni trop chaud ni trop froid ») que lors de la période de référence avant expérience.

Distribution des réponse à la question « Comment décririez-vous, au moment de remplir ce questionnaire,
l’ambiance thermique à votre poste de travail ? », sur une échelle allant de -3 (très froid) à +3 (très chaud), avec un neutre à 0.

Ils montrent aussi une augmentation sensible de la satisfaction thermique pendant l’expérience.

Distribution des réponse à la question « Comment jugez-vous l’ambiance thermique à votre poste de travail ? »
sur une échelle allant de 1 (très insatisfaisant) à 6 (très satisfaisant), sans possibilité de réponse neutre.


Avis sur les dispositifs de correction thermique

L’enquête révèle une disparité importante de satisfaction vis-à-vis des différents dispositifs de correction thermique distribués. Si le chauffe-main fait l’unanimité, le dossier de chaise présente un résultat plus contrasté tout en restant très majoritairement apprécié, alors que le chauffe-pied est unanimement jugé insatisfaisant.
Ce tableau résume les avantages et inconvénients de ces différentes solutions :

Dispositif Avantage Inconvénient
Chauffe-main
  • peu encombrant
  • Efficace
  • Sensation de chaleur immédiate
  • Chaleur ressentie au-delà des mains
  • Parfois jugé trop puissant ou insuffisamment modulable en température
  • Odeur de plastique chaud lors des premiers usages
  • En cas de grand froid (12°), jugé efficace pour les paumes et poignets ,mais inefficace pour le haut des main.
  • L’apport de chaleur sous un laptop pose question sur le bon fonctionnement de celui-ci
Dossier et assise chauffants
  • Puissant, rapide et efficace. « Parfait quand il fait entre 16-17,5°C »
  • Apport de chaleur au niveau du dos apprécié
  • Fil encombrant
  • Jugé parfois trop puissant, même en puissance minimale
  • Contraste trop important de ressenti entre la position assise et lorsque l’on se relève, ou entre le dos et les extrémités du corps
  • Apport de chaleur au niveau de l’assise pas toujours apprécié, et pose de question de santé à terme (apport de chaleur sur la zone génitale)
Chauffe-pied
  • Néant
  • Très souvent jugé non nécessaire
  • Peu efficace lorsqu’utilisé : trop faible sensation de chaleur
  • Cable au sol encombrant

Conclusions

L’expérience confirme le potentiel des systèmes de correction thermique individuels. Ceux-ci peuvent effectivement augmenter la satisfaction individuelle et, dans certains cas, garantir celle-ci dans des conditions « hors normes ». En effet, les participants sont plutôt d’accord avec les affirmations selon lesquelles :

  • les dispositifs de correction proposés sont en mesure de corriger une situation de départ inconfortable, et
  • ceux-ci permettent de réduire les températures sans perte de bien-être.

Cependant, il apparait également que pour une partie non négligeable des participants, ces dispositifs n’ont pas permis de réduire la température. Ils ont alors servi de moyen d’améliorer la satisfaction dans les ambiances telles que prévues par la régulation centralisée (entre 18 et 20°C).

Il serait donc abusif, sur base de cette seule expérience, de présenter les systèmes de correction thermique comme une panacée permettant de réduire de façon centralisée les températures cibles.

Réduction des températures intérieures à Malmédy

Vue sur le monastère de Malmedy
Monastère de Malmedy, siège, entre autres, de l’administration communale

Durant l’hiver 2023, face à l’augmentation du prix de l’énergie (le prix au MWh est passé de 42.63€ en 2022 à 64.44€ soit une augmentation de 52%), l’administration communale de Malmédy a fait un effort de réduction des températures intérieures. Voici leur retour d’expérience.


Cas d’étude

Le bâtiment du monastère, situé à Malmédy, est une ancienne abbaye dont la construction date du XIIIème siècle, mais donc les bâtiments actuels sont du XVIIIème. La commune l’utilise pour diverse fonctions : bureaux, salles de réception, musée,…

La commune a déjà mis en oeuvre divers travaux d’amélioration de la performance énergétique, notamment des remplacement de châssis et la fermeture du cloître par une verrière. La qualité patrimoniale du site complique cependant les interventions.

L’installation de chauffage présente des circuits séparés pour les différentes fonctions du bâtiment, avec régulation par vannes thermostatiques et alimentation par des chaudières gaz de 250 kW. Selon un audit réalisé en 2023, reprenant les factures de l’année 2021, les consommations du bâtiment sont de 114 MWh/an d’électricité et 740 MWh/an de gaz, pour un coût d’environ 24 000 et 31 000 EUR/an respectivement.


Démarche

La commune a invité le personnel à vérifier le réglage des vannes thermostatiques en visant une position « 2.5» . Celle-ci correspond normalement  à une température de l’ordre de 19C°. Des affiches ont été apposées pour sensibiliser le personnel.

Aucune autre action n’a été prise au niveau de la régulation. C’est donc bien une démarche volontaire des participants, dans un contexte de crise énergétique.

Affiche de sensibilisation
Affiche apposée par la commune de Malmedy dans les locaux du monastère

Aider les plus sensibles

Pour ceux souffrant du froid, l’administration a mis à disposition des dispositifs de chauffage de proximité sous la forme de 35 sous-main chauffants, pour 65 employés. Ceux-ci ont une puissance maximale de 80W et deux positions de réglage, qui leur permettent de monter à 35 ou 60°C au choix de l’utilisateur. L’objectif est de chauffer les poignets par contact et les mains par rayonnement, car il s’agit d’une des zones les plus sensible du corps, et souvent la première à s’engourdir lors du travail de bureau en ambiance fraîche.

Sous-main chauffant
Exemple de sous-main chauffant

Résultats

Suite à la compagne de sensibilisation, les occupants ont réduit les températures d’environ 1°C en moyenne. Cela a permis une économie de 57.168 kWh soit une diminution de 9%. Puisque les 2 hivers sont comparables, l’abaissement de température expliquent donc cette diminution.

Au final, une économie de près de 3500 EUR par an pour la ville. Cela couvre très largement le prix d’achat (environ 15 EUR pièce) et les consommations des tapis chauffants. Celle-ci peut en effet être estimée à :

  • 80W (au maximum)
  • 6 heures par jour
  • 150 jours par an
  • = 80*6*150 = 72 000 Wh/an, ou 72 kWh/an
  • un kWh électrique à environ 40 centimes d’euro,
  • soit une trentaine d’euros par an et par sous-main, avec des hypothèses très défavorables.

Au niveau ressenti, le responsable énergie de la commune n’a relevé aucune perte de confort :

« Il n’y a pas eu de perte de confort dû à la baisse de T°. Que du contraire, puisque les tapis sous-mains chauffant ont même augmenté le confort des personnes les plus frileuses. »

Le slowheating… un peu trop vite ?

  1. Dossiers de chaise chauffants.
  2. Sous-mains chauffants.
  3. Panneaux radiants.
  4. Plaids chauffants.

Retour d’expérience d’un projet de slowheating dans des bureaux namurois.


De quoi s’agit-il ?

Le slowheating est une stratégie de chauffage basée sur le maintien d’une température d’ambiance plus basse que les standards habituels, avec compensation par des dispositifs chauffant à l’échelle des personnes, ainsi que des changements comportementaux et organisationnels.

L’expérience rapportée ici est celle d’un bureau d’études wallon qui a mis en place une expérience de ce type durant l’hiver 2023.


Mise en place

Ce bureau dispose de différents espaces de travail de type open space et bureaux individuels, distribués dans des anciens bâtiments à la performance énergétique médiocre. L’installation de chauffage est vétuste, et constituée d’un circuit de chauffage central alimenté par une chaudière fuel, sans thermostats d’ambiance. La régulation se faisait jusque-là sur base d’une courbe de chauffe et de vannes thermostatiques. Mais la régulation de la chaufferie est défectueuse et les vannes thermostatiques peu précises. On est donc en pratique dans une situation de chauffage permanent avec un réglage de la température ambiante difficile et dépendant des conditions météo.

A l’initiative du personnel, un séminaire interne à l’entreprise a été animé avant l’hiver par un expert en slowheating : l’occasion de présenter le concept et d’échanger sur la pertinence de sa mise en place dans le bureau. Suite à quoi un groupe de travail interne s’est mis en place pour préparer l’expérience.

Plusieurs options ont été explorées, pour finalement aboutir à une décision de réduction de la température d’ambiance dans deux des trois espaces open space. Cela implique environ la moitié de l’équipe la plus motivée a priori par la démarche. Cette première expérience a eu lieu en février 2023. La chute de température a été obtenue en fermant les vannes des radiateurs des locaux concernés. Sans contrôle donc sur la température résultante, qui en pratique était de l’ordre de 16 à 17°C le matin. Peu d’élévation de température en cours de journée est signalé, notamment du fait d’une ventilation « à l’ancienne » par ouverture de fenêtre.

A titre de compensation, du matériel chauffant a été mis à disposition, en « libre-service ». Chaque travailleur ne disposait pas de matériel attribué, faute de connaissance en amont de quels dispositifs pourraient satisfaire les employés. La direction a dès lors investi dans quelques sous-mains chauffants, des panneaux radiants, des dossiers de chaise chauffants et des plaids chauffants. Ce matériel n’est cependant arrivé que tardivement, et après le début de l’expérience. Dans un premier temps, les employés ont donc « fait avec », et joué sur leur habillement principalement. Une mobilité entre bureaux était possible, mais n’a pas été exploitée par les travailleurs.

En fin d’hiver, la décision a été prise de couper complètement le chauffage, vu le redoux. Peut-être un peu trop hâtivement, car un WE froid et venteux a entraîné des températures de l’ordre de 14°C un lundi matin, dans l’ensemble des open-spaces, … sans que du matériel chauffant complémentaire n’ait été prévu.


Retours d’expérience des membres du personnel

Les retours des participants sont divers. Si certains ont globalement apprécié la démarche, d’autres étaient beaucoup plus critiques. Puisque l’on apprend surtout de nos erreurs, concentrons-nous sur les difficultés rencontrées :

  • Certains expriment une frustration quant à l’absence de matériel chauffant en suffisance, en particulier lors de l’élargissement de la coupure de chauffage. Cette frustration est multipliée par le fait que les personnes touchées à ce moment-là n’étaient pas volontaires au départ.
  • Certains ont exprimé des critiques sur le matériel mis à disposition. Les sous-mains chauffants auraient dans un cas déformé un clavier plat posé dessus. Les panneaux radiants posés sur le bureau entravent la vue et la communication entre collègues, sans régler l’inconfort au niveau des pieds. Etc.
  • Certains expriment plus généralement une difficulté d’adhésion à l’idée d’un inconfort sur son poste de travail : « On vient pour bosser. Si en plus il fait froid… »
  • Certains expriment un dilemme émotionnel. D’une part leur conscience environnementale les mène rationnellement à comprendre la démarche. D’autre part, l’expérience physique d’inconfort est difficile à assumer. « Je n’osais pas me plaindre ».
  • Le fait qu’un espace de convivialité tel que le local de pause et de lunch ait également été froid a aussi été pointé comme une difficulté :  « on n’a même pas envie de rester à la machine à café car on ne s’y réchauffe pas ».
  • Enfin, l’installation de chauffage ne permettant pas de mesurer un bénéfice environnemental a été pointé comme un défaut. Pour certains, il est nécessaire de voir « le bénéfice de l’effort » pour maintenir de la motivation. Notons cependant qu’aucune gratification du personnel n’était associée à des économies d’énergie… On parle donc ici uniquement de motivation environnementale.

Quelques autres retours intéressants :

  • Entrer dans cette démarche a rendu certains hyper critiques envers le fonctionnement thermique d’autres espaces. Par exemple, des WC chauffés plus que les bureaux a interpellé sur le sens des priorités.
  • Au-delà des avantages et inconvénients des différents dispositifs chauffants (à ce stade jugés globalement trop peu durables), la clef du confort semble se situer dans l’habillement. Une fois celui-ci adapté à des températures fraiches, seul le confort des mains et des pieds peut être problématique. Cependant, les différences de températures fortes entre locaux peuvent poser problème si l’on est « trop habillé ».
  • Le fait d’être habillé chaudement est perçu par certains comme une gêne pour des tâches de bureau. D’autres évoquent également le fait qu’il est aussi plus difficile d’être coquet lorsqu’on est emmitouflé sous des couches épaisses.
  • Il a été perçu comme non acceptable de diminuer la température dans les salles de réunion, vu que celles-ci accueillent des externes pas au courant ni sensibilisé à la démarche (et du coup pas habillé en conséquence)
  • Certains des convaincus mentionnaient, malgré leur adhésion, une forme de fatigue au fil du temps.
  • « Si on a froid en arrivant, c’est foutu, on n’arrive pas à se réchauffer » … d’où l’intérêt d’un bon équipement également pour l’extérieur, notamment par temps pluvieux. Certains ont relevés qu’il fallait s’habiller plus chaudement pour du travail de bureau à l’intérieur que pour circuler à l’extérieur.  Cela est à l’opposé de nos habitudes et perturbe.
  • Les courants d’air froids et la température de surface des parois impactent sensiblement le confort, or ceci n’est pas mesuré par les thermomètres ni les vannes thermostatiques. Il n’est pas facile au début d’identifier la source de son inconfort, et donc les solutions pour l’améliorer.  Essayer trop brusquement de descendre la température ambiante risque dès lors de tuer la démarche Slowheat dans l’œuf.

Enseignements

De l’expérience de ce bureau, nous pouvons tirer quelques enseignements. A garder à l’esprit pour de futures expériences :

  • Assurer de l’adhésion en amont, ce qui implique des explications, une préparation, un temps d’expérimentation et un réel espace de discussion sur les modalités concrètes. Le sentiment d’une démarche imposée ou insuffisamment préparée (manque de matériel par exemple) pèse lourdement dans le résultat mitigé de cette expérience.
  • Assurer de la cohérence : Pour être accepté, le slowheating doit s’inscrire dans une démarche cohérente de bonne gestion énergétique. Sans cela, l’engagement du personnel sera difficile à assurer.
  • Donner de la flexibilité : Un changement des conditions de travail tel que visé ici devrait probablement aller de pair avec une réflexion plus large sur l’organisation des espaces de travail. On peut regrouper les personnes partageant des sensibilités proches. Ou rassembler les personnes aux horaires semblables pour justifiant des moments de remontées en température. En tous les cas, la tendance à aller vers des grands open-spaces et bureaux partagés ne facilite pas le slowheating. Et quand bien même cette flexibité serait-elle présente (c’est le cas ici), elle n’est pas si facile à mettre en œuvre en pratique. Certains sont attachés à leur poste de travail ou sont contraints par le matériel au vu des tâches qu’ils font.
  • Individualiser les dispositifs de compensation : Le partage d’équipements chauffants semblait ici problématique pour trois raisons. Premièrement, ce qui s’assimile à des vêtements (plaids,…) pose des questions d’hygiène. Deuxièmement, certains dispositifs sont encombrants et donc peu mobiles. Troisièmement, l’organisation du partage n’est pas évidente (premier arrivé = premier servi ?). Faut-il dès lors aller vers la distribution de bons d’achat plutôt que de matériel ? Ou l’organisation par l’employeur d’un achat groupé mais dans lequel chacun peut, après expérience sur du matériel de démonstration, sélectionner les dispositifs qui lui conviennent ?

Conclusion : Chi va piano va sano e va lontano ?

Avec notre regard extérieur, il nous semble que l’expérience partagée ici était peut-être trop ambitieuse.  une réduction trop forte des températures intérieures, trop rapidement ?

Pourquoi cette impression ? parce que beaucoup des personnes interrogées parlent d’un effort à faire, de motivation à entretenir, … Or, l’idée du slowheating est de changer de mode de fonctionnement pour trouver un nouvel équilibre. Si tout changement est un effort, la situation d’arrivée ne devrait pas en être un, faute de quoi la poursuite dans la durée sera difficile.

Dans ce cas-ci, la faible flexibilité de gestion de l’installation de chauffage au départ est en partie responsable. Ne pas pouvoir gérer l’installation de chauffage pour disposer de la température souhaitée n’aide évidemment pas à garder le contrôle. Or, la capacité à choisir la température d’ambiance et à se réchauffer lorsque besoin est un élément clé de toute démarche de slowheating. Comme le disait un des employés :

« Nous avons plus fait une expérience de résistance au froid qu’une expérience de slowheating ».

Chauffage de proximité

Principe:

Les systèmes de chauffage de proximité sont un ensemble d’équipements de chauffage permettant un apport d’énergie thermique de façon très précise dans l’espace et le temps. En particulier, il s’agit de dispositifs mobiliers permettant de chauffer directement le corps, par conduction (contact) ou rayonnement infra-rouge. Ils s’utilisent en complément du système de chauffage central pour assurer le confort individuel, en particulier dans une approche de slowheating.


Palette de solutions

Crédit Denis De Grave

On peut considérer un grand nombre d’équipements mobilier ou vestimentaires comme des chauffages de proximité. C’est pourquoi le projet de recherche Slowheat en propose une classification pour les espaces de logement sur base de leur sobriété énergétique. Cette classification, adaptée ici pour des usage de (télé)travail, les présente comme prioritaires sur le chauffage central :

Classe Puissance Familles de solutions Exemples

Classe A, le bon sens non-énergétique

0 watts Habillement, cloisonnement, acclimatation, adéquation de l’activité Mettre un pull, fermer une porte, alterner des périodes statiques et des périodes de mouvement…

Classe B, le chauffage de proximité basse puissance des corps [Par conduction]

± 50 W/corps Accessoires vestimentaires et/ou du mobilier chauffants en contact avec le corps. Chaise chauffante, gilet chauffant, sous-clavier chauffant…

Classe C, le chauffage de proximité moyenne puissance de l’environnement proche des corps [Principalement par rayonnement]

± 300 W/corps Par des éléments radiants et/ou du mobilier chauffant à proximité directe des bénéficiaires. Panneau radiant, table chauffante…

Classe D, le chauffage centralisé d’une pièce entière [Principalement par convection]

± 1 500 W/pièce Les vannes thermostatiques, le(s) radiateur(s) en place, un thermostat adapté. Chauffer une pièce à 15-17° quand on y est pour que les solutions ABC restent suffisantes.

Classe E, le chauffage centralisé du bâtiment entier

±5 000 W/logement Le chauffage central Garder le chauffage central en alerte pour maintenir le bâtiment hors gel (8 °C) ou à une température « de passage”, par exemple 12-15 °C.

Outre les accessoires mobiliers, des éléments de chauffage plus classiques pourraient être considérées comme des systèmes de chauffage de proximité. On pense notamment aux plafonds chauffants. Il faut cependant pour cela qu’ils répondent à trois exigences :

  • Etre pensés à une petite échelle : il ne s’agit pas ici d’élément chauffant uniformément un grand espace.
  • Pouvoir se réguler directement par l’occupant, en fonction de son ressenti, et non sur base d’une consigne d’ambiance.
  • Avoir une grande réactivité : pas plus de quelques minutes entre la demande de chaleur et le ressenti par l’occupant.

Efficacité énergétique

La littérature scientifique exprime souvent l’impact de ces système de chauffage en « degrés équivalents ». L’idée est la suivante : on mesurer le confort d’une cohorte d’individus dans une ambiance de référence, sans équipement de chauffage de proximité, puis le confort d’une autre cohorte dans une ambiance plus fraiche mais avec la possibilité d’utiliser de tels équipement. En multipliant les expériences pour différentes températures d’ambiance, on peut identifier celle qui mène à une satisfaction moyenne équivalent à la situation de référence. L’écart entre cette température et celle de référence donne une idée de l’impact des équipements testés.

Parallèlement, la consommation d’énergie liée à ces dispositifs peut être monitorée, et exprimée en watt par degré d’ambiance compensé.

De façon plus synthétique, un « review » de la littérature publié en 2022 a identifiée 20 études rigoureuses impliquant des systèmes de chauffage individuels, de 5 types différents((Thermal comfort and energy performance of personal comfort systems (PCS): A systematic review and meta-analysis, Song, Z. Zhang, Z. Chen, F. Wang and B. Yang, Energy and Buildings 2022 Vol. 256, DOI: 10.1016/j.enbuild.2021.111747)) : chaises chauffantes, chauffes pieds, tapis de sol chauffant, souffleur d’air chaud de table ou une combinaison de solutions. Leur analyse est résumée par la figure suivante, qui met en regard la température d’ambiance de confort pouvant être atteinte et la consommation d’énergie de compensation par le système de chauffage individuel :

Efficacité de différents dispositifs de chauffage de proximité, mesurée par la puissance nécessaire par degré de réduction d’ambiance pour un confort équivalent. Inspiré de Song et al, 2022.

On voit un potentiel de réduction des températures très importante, mais aussi très variable selon les études, signe d’une grande diversité de potentiel selon les dispositifs testés. Ce qui semble clair par contre c’est la très faible puissance nécessaire pour assurer le confort dans ces températures basses : de l’ordre de l’une ou l’autre dizaine de watt par degré (et par personne). En effet, parmi les dispositifs testés, les chaises chauffantes semble avoir la meilleure efficacité énergétique (moins de watt par degré de réduction d’ambiance). A l’opposé, des tapis de pied chauffants seraient les moins efficaces au niveau énergie.


Parties du corps à viser

Concernant les zones du corps à viser en priorité, un autre review indique que dans un environnement froid, c’est l’apport de chaleur au niveau de l’abdomen qui serait perçu comme le plus confortable((Effectiveness of personal comfort systems on whole-body thermal comfort – A systematic review on which body segments to target, W. Luo, R. Kramer, Y. de Kort and W. van Marken Lichtenbelt, Energy and Buildings 2022 Vol. 256, DOI: 10.1016/j.enbuild.2021.111766)). Par contre, l’apport de chaleur au niveau de la tête n’aurait que très peu d’impact.

Quant aux extrémités (mains et pieds), zones sensibles au froid, elles seraient positivement affectées par une apport de chaleur indirect au niveau du torse et du bas du dos, signe que des apports de chaleur locaux peuvent avoir des impacts plus larges sur le corps. Mais avec des limites : la perception de chaleur au niveau de la tête étant par exemple très peu impactée par un apport de chaleur sur d’autres parties du corps.

L’un dans l’autre, il semble que c’est la combinaison d’un apport de chaleur au niveau du torse (grande surface de contact) pour le confort général et au niveau des extrémité (zone sensible) pour la résolution d’inconforts localisés qui soit le plus efficace…. Si nous sommes relativement peu vêtus. Si l’on multiplie les couches vestimentaires, en particulier au niveau du torse, c’est l’apport de chaleur a niveau des extrémités qui devient crucial.

« The current knowledge indicates that, in an office context, in mild excursions outside the thermal comfort zone, hands and feet are the sources of thermal discomfort in the cold and the head is the source of thermal discomfort in the warmth. A novel Personnel Comfort System scheme, which targets only the extremities and head, is suggested. This scheme may eliminate the local thermal discomfort of the extremities and head while maintaining the thermal excitation to the torso in mild cold/warm conditions, thus providing a solution for creating a healthy and comfortable indoor environment. »((id.))

 

Dispositif de confor de proximité idéal : le torse correctement couvert mais laissé en interaction avec l’ambiance (1 et 3), tandis que les extrémités reçoivent des apports spécifique, de chaleur en hiver sur les pieds et les mains (2) et de faicheur sur la tête en été (4). D’après Luo et al, 2022.

Retours d’expériences

Différentes expériences de mise en œuvre des principes du slowheating, incluant le recours à des systèmes de chauffage de proximité sont racontées dans nos études de cas (dans une école, dans un bureau, dans une administration). De celles-ci, nous pouvons tirer les enseignements suivants :

  • Il est important que la puissance puisse être modulée. Jouez sur l’intensité ou sur des cycles marche-arrêt.
  • Tout le monde n’apprécie pas les mêmes apports de chaleur. Les sous-claviers chauffants semblent récolter une quasi-unanimité. Mais les apports de chaleur sur le dos et, surtout, les cuisses, ne plaisent pas à tout le monde. Il est donc important de prévoir différents dispositifs et de laisser chacun expérimenter.
  • Les expériences de partage de dispositifs dont nous avons eu vent ne semblent pas concluantes. A priori, à chacun son matériel. Surtout s’il s’agit d’élément en contact avec le corps.
  • Les études de cas montrent beaucoup de frustration. La qualité et durabilité des éléments actuellement présents sur le marché pose question.

Améliorer le confort thermique en été via notamment l’isolation des parois

L’importance de l’isolation thermique dans les bâtiments tertiaires ne fait aucun doute, non seulement pour réduire la consommation d’énergie, mais aussi pour créer un environnement intérieur confortable tout au long de l’année. Cependant, une question se pose : est-ce que certains matériaux isolants offrent un meilleur confort thermique en été que d’autres ?

C’est l’un des arguments de vente de certains fabricants. La capacité thermique de leurs isolants étant plus élevée, ils contribueraient à augmenter le déphasage thermique et donc le confort d’été.

Théoriquement, la vitesse de propagation de la chaleur dépend de la conductivité thermique (W/m.K) et de la capacité thermique volumique (J/m3.K) de la paroi. L’augmentation de température de la paroi intérieure survient donc après un certain laps de temps, appelé déphasage, et de manière atténuée, grâce à l’isolation.


Définition : Capacité thermique

Quantité de chaleur nécessaire pour élever d’un degré (Kelvin) la température d’un m3 de matériau.

La capacité thermique d’un matériau est la quantité de chaleur nécessaire pour élever d’un degré (Kelvin) la température d’un mètre cube (m³) de ce matériau. Elle est le produit de la masse volumique (exprimée en kg/m³) et de la chaleur spécifique Cp  (exprimée en J/kg.K).

Pour éclaircir cette question, le CSTC (Centre Scientifique et Technique de la Construction, connu désormais sous le nom de Buildwise) a réalisé une simulation dynamique de la variation de la température dans une pièce sous toiture isolée, en utilisant des matériaux ayant des capacités thermiques différentes, tout en étant soumise à un épisode de canicule de 15 jours.

pièce sous toiture isolée

Exemple de deux isolants similaires au point de vue de leur conductivité thermique mais fort différents quant à leurs capacités thermiques


Isolant

Conductivité thermique

(W/m.K)

Masse volumique

(kg/m3)

Chaleur spécifique

Cp (J/kg.K)

Capacité thermique volumique

(J/m3.K)

Laine de bois 0,039 55 2000 110
Laine minérale 0,035 25 1030 26

Les conclusions du CSTC (Buildwise) indiquent que, bien que le déphasage et le confort en été augmentent en fonction de  l’épaisseur de l’isolant, lorsque l’épaisseur d’isolant et la conductivité thermique sont équivalentes, l’impact de la capacité thermique du matériau utilisé reste relativement faible, en particulier par rapport à d’autres paramètres à prendre en compte.

Outre les propriétés intrinsèques des matériaux, voici les éléments qui ont le plus d’influence sur le confort thermique en été dans les bâtiments tertiaires :

  • L’épaisseur de l’isolant (et sa conductivité thermique) ;
  • Les protections solaires extérieures pouvant limiter l’apport solaire ;
  • La mise en place d’une ventilation nocturne intensive pour faire baisser la température intérieure ;
  • La réduction des sources internes de chaleur ;
  • La présence d’une masse thermique élevée et accessible, telle que le plafond ou le sol, qui contribue à l’inertie thermique du bâtiment.

Ces facteurs jouent un rôle essentiel pour assurer un confort thermique optimal en été dans les bâtiments tertiaires, qu’il s’agisse de rénovations, de constructions neuves ou simplement de la gestion quotidienne de l’énergie.

Article réalisé par l’ICEDD (Institut de Conseil et d’Etudes en Développement Durable) – https://www.icedd.be/.

Référence :

Dossiers du CSTC – N° 3/2010 – Cahier n°6 – Capacité thermique des isolants et risque de surchauffe