Pour estimer, dans votre situation, la rentabilité de la gestion de la ventilation (réduction de l’horaire journalier de ventilation, variation de vitesse des ventilateurs en fonction d’une sonde CO2, détection de présence dans chaque local) :
Voici, à titre d’exemple, comment peuvent être estimées les économies réalisables par une gestion de la ventilation à la demande et la rentabilité de tels projets.
Formules permettant de chiffrer l’économie réalisable
L’évaluation exacte du coût énergétique de la ventilation est relativement complexe. Elle nécessite soit un programme de simulation numérique (lors de la conception), soit des mesures détaillées (bâtiment existant). Cette consommation dépend du climat, du type de système de ventilation et de gestion, de l’isolation du bâtiment, des gains internes, des gains solaires, …
L’économie réalisée provient d’une part de la diminution des consommations de chauffage de l’air neuf et d’autre part de la diminution de la consommation électrique du ventilateur.
Consommation de chauffage
Une formule simplifiée permet de donner une valeur approximative de la consommation de chauffage due à la ventilation :
Consch = 0,34 x qv x ΔTmoy x t / ηch
où,
- 0,34 W/m³.K est la capacité calorifique de l’air
- qv est le débit de ventilation en m³/h
- ΔTmoy est la différence entre la température de consigne de l’ambiance et la température extérieure moyenne
- t est le nombre d’heures de fonctionnement annuel
- ηch est le rendement de l’installation de chauffage à eau chaude (en moyenne : 0,7)
Consommation électrique du ventilateur
L’économie électrique réalisée grâce à la réduction du débit des ventilateurs est plus difficile à estimer. Tout au plus peut-on rechercher des ordres de grandeur réalistes : la consommation électrique d’un ventilateur peut être estimée suivant une règle de bonne pratique : la puissance électrique absorbée par une ventilation double flux dans ses conditions nominales de fonctionnement est de l’ordre de :
2 * 0,14 (installation performante : SFP1) à 0,35 W (installation médiocre : SFP3) par m³/h d’air transporté
En outre, les règles de similitudes des ventilateurs montrent que si on ne tient pas compte des pertes du système de réglage, la puissance absorbée par un ventilateur varie comme le cube de sa vitesse et donc comme le cube du débit.
![Schéma technique. Schéma technique.](https://energieplus-lesite.be/wp-content/uploads/2019/03/Reglagevitessecourbe.JPG)
Modification du point de fonctionnement et donc de la puissance absorbée par un ventilateur en fonction de sa vitesse (en passant de la vitesse n1 à n2).
Notons que lorsque la température extérieure est inférieure à la température ambiante, la consommation électrique des ventilateurs de pulsion est récupérée sous forme de chaleur dans l’air neuf et ne constitue donc plus une perte d’énergie. On remplace juste souvent un chauffage par combustible par un chauffage électrique.
Exemple 1 : mise à l’arrêt d’un ventilateur en période d’inoccupation, en fonction d’une horloge
Un ventilateur sanitaire extrait 1 000 m³/h, dans un immeuble de bureaux occupé de 8 à 18 h. Par rapport à un fonctionnement en continu, l’adaptation des horaires de ventilation à l’occupation permet d’économiser :
en électricité :
0,25 [W/(m³/h)] x 1 000 [m³/h] x 6 160 [h/an] = 1 540 [kWh/an]
où,
- 0,25 W/(m³/h) est un ordre de grandeur de puissance absorbée pour une extraction seule
- 6 160 h/an est le nombre d’heures d’inoccupation des bureaux durant l’année
en chauffage :
0,34 [W/m³.K] x 1 000 [m³/h] x (16 [°C] – 5 [°C]) x 4 130 [h/an] / 0,7 / 1 000 = 22 066 [kWh/an] ou 2 200 litres de fuel ou m³ de gaz par an
où,
- 16° est la température de consigne de chauffage en période de ralenti et 5° la température extérieure moyenne nocturne durant la saison de chauffe.
- 4 130 h/an est le nombre d’heures d’inoccupation des bureaux durant la saison de chauffe (35 semaines/an ou 5 880 h/an)
L’économie financière totale s’élève de 1614,8 [€/an] (à 0,622 €/ litre de fuel et 0,16 €/kWh en heures creuses).
L’investissement à consentir pour une horloge programmable est de l’ordre de quelques dizaines d’euros.
Exemple 2 : variation de la vitesse d’un ventilateur en fonction d’une sonde CO2 dans une salle de conférence
Un système de ventilation double flux alimente une salle de conférence de 200 places. Le débit d’air de ventilation est de 4 000 m³/h lorsque la salle est remplie.
La ventilation de la salle n’est assurée qu’en semaine (soit 50 h/semaine, pendant 32 semaines ou 1 600 h/an), alors qu’en fait, elle est occupée 4 jours par semaine pendant 10 h (de 8h30 à 18h30) par 100 personnes en moyenne.
Si on stoppe la ventilation durant la journée d’inoccupation (soit 320 h/an), on peut déjà économiser :
en électricité :
0,5 [W/(m³/h)] x 4 000 [m³/h] x 320 [h/an] = 640 [kWh/an]
où,
- 0,5 W/(m³/h) est un ordre de grandeur de puissance absorbée pour une ventilation double flux de qualité moyenne
en chauffage :
0,34 [W/m³.K] x 4 000 [m³/h] x (20 [°C] – 8 [°C])
x 320 [h/an] / 0,7 / 1 000 = 7 460 [kWh/an] ou 746 [litres de fuel ou m³ de gaz]
où,
- 20° est la température de consigne de chauffage en journée et 8° la température extérieure moyenne diurne durant la saison de chauffe
- notons que cette valeur peut être très légèrement diminuée (de l’ordre de 400 kWh/an) si on veut tenir compte du fait que la consommation du ventilateur de pulsion était récupérée sous forme de chaleur dans l’air neuf.
D’autre part, en période d’occupation (1 280 h/an), on peut réduire la vitesse et donc le débit du ventilateur en l’adaptant au taux réel d’occupation. Le débit moyen de ventilation deviendrait alors de l’ordre de 2 000 m³/h.
L’économie d’électricité est plus difficile à estimer. Puisque la puissance absorbée par un ventilateur varie comme le cube de la variation de sa vitesse donc de son débit, on peut grossièrement dire qu’au mieux, la consommation électrique va être divisée par 8 (= (4 000 / 2 000)³) :
consommation d’origine (en occupation) :
0,5 [W/m³/h] x 4 000 [m³/h] x 1 280 [h/an] = 2 560 [kWh/an]
consommation avec régulation de vitesse :
2 560 / 8 / 0,8 = 400 [kWh/an]
économie d’électricité :
2 160 [kWh/an]
où,
- le facteur 0,8 tient compte du rendement du système de variation de vitesse qui n’est jamais de 100 %
En réduisant le débit d’air neuf de 4 000 m³/h à 2 000 m³/h, l’économie de chauffage durant la saison de chauffe (960 h/an) est estimée à
0,34 [W/m³.K] x 2 000 [m³/h] x (20 [°C] – 8 [°C]) x 960 [h/an] / 0,7 / 1 000 = 11 191 [kWh/an]
Si on veut être plus précis, il faut déduire de cette économie, l’économie d’électricité déjà réalisée sur le ventilateur de pulsion, de l’ordre de 1 400 kWh (soit environ 2/3 de l’économie électrique totale).
Récapitulatif : économie réalisable par une gestion de la vitesse des ventilateurs en fonction d’une sonde CO2 |
|
[kWh/an] |
[€/an] (0,16 €/kWh élec,
0,0622 €/kWhth ou 0,622 €/litre fuel) |
Coupure de la ventilation en période d’inoccupation (320 h/an) |
Électricité |
640 |
102,4 |
Chauffage |
7 460 – 400 = 7 060 |
439,1 |
Réduction de la vitesse du ventilateur en période d’occupation |
Électricité |
2 160 |
337,0 |
Chauffage |
11 191 – 1 400 = 9 791 |
648,2 |
Économie totale |
19 851 |
1526,7 |
L’économie totale varie en fonction de la qualité de départ de l’installation. Cette économie sera par ailleurs probablement encore réduite car le rendement du ventilateur risque aussi de varier légèrement lorsque l’on réduit sa vitesse.
L’investissement nécessaire à la gestion de cette salle de séminaire consiste en une sonde CO2 commandant un convertisseur de fréquence agissant sur le moteur des deux ventilateurs d’extraction et de pulsion. Le coût estimé d’une telle installation est de l’ordre de 3000 €, soit un temps de retour de l’ordre de 2 ans.
Si on envisage la régulation avec variation de fréquence dès la conception de l’installation, le surcoût de l’installation régulée par rapport à l’installation fonctionnant en continu sera nettement moindre que cette somme. En effet, lorsque l’on équipe directement un ventilateur d’un convertisseur de fréquence, certains équipements deviennent superflus comme par exemple : les entraînements par courroies, le démarreur étoile-triangle nécessaire à la limitation du courant de démarrage et les clapets de régulation de pression.
Les coûts des deux installations risquent même d’être presque semblables.
En fonction du type de situation rencontrée, on peut envisager certaines variantes à ce projet. Lorsque le système de ventilation supporte également le chauffage et/ou le refroidissement, on peut envisager que la sonde agisse automatiquement sur le volet d’air neuf, réglant selon les besoins la répartition entre air neuf et air recyclé. En parallèle, la vitesse du ventilateur d’extraction s’adapte automatiquement à l’ouverture des volets. C’est entre autres ce mode de régulation que l’on peut rencontrer dans les piscines, la grandeur représentative utilisée étant l’humidité relative.
La régulation de vitesse peut aussi se faire par palier lorsque le moteur existant est un moteur à plusieurs vitesses.
Exemple 3 : Ventilation indépendante de bureaux en fonction de sondes de présence
Un immeuble de 20 bureaux individuels est ventilé par un système double flux (pulsion dans chacun des bureaux et extraction sanitaire). Quel est l’intérêt de choisir des bouches de pulsion avec détecteur de présence intégré ?
L’installation envisagée comprend pour chaque local une bouche de pulsion commandée en tout ou rien en fonction d’un détecteur de présence et un manchon autoréglable garantissant la constance des débits dans les locaux occupés, ce malgré la fermeture de certaines bouches dans le réseau. Le ventilateur choisi est un ventilateur à courbe caractéristique plate qui permet le maintien d’une pression constante au départ du circuit (on ne tient donc pas compte du coût d’un éventuel convertisseur de fréquence).
Le coût d’une bouche de pulsion avec détection de présence est de l’ordre de 150 €. On peut estimer le nombre minimum d’heures de coupure par bureau individuel nécessaire pour rentabiliser la régulation en un temps de retour inférieur à 5 ans.
L’économie annuelle doit être au minimum de 150 €/ 5 ans = 30 €/an.
> économie d’électricité :
0,5 [W/(m³/h)] x 30 [m³/h] x nb heures / 1 000 x 0,16 [€/kWh]
où,
- 0,5 W/(m³/h) est un ordre de grandeur de puissance absorbée pour une ventilation double flux de qualité moyenne
- 0,16 €/kWh = prix de l’énergie électrique
- 30 m³/h = débit de ventilation d’un bureau occupé. Puisque le ventilateur maintient une pression constante en début de circuit, la variation de consommation électrique reste plus ou moins proportionnelle à la variation de débit
![](https://energieplus-lesite.be/wp-content/uploads/2019/03/gestion4localdf42.gif)
Réduction de débit et de puissance (rectangle vert) d’un ventilateur à courbe caractéristique plate, lorsque qu’une bouche de pulsion du réseau se ferme.
Économie en chauffage :
0,34 [W/m³.K] x 30 [m³/h] x (20 [°C] – 8 [°C])
x NB heures / 0,7 / 1 000 x 0,0622 [€/kWh]
où,
- 30 m³/h = débit recommandé dans chaque bureau
- 20° = la température intérieure de consigne
- 8° = température extérieure moyenne diurne durant la saison de chauffe
- NB heures = nombre d’heures annuel de coupure nécessaire pour rentabiliser la régulation
- 0,0622 €/kWh = prix du fuel (1 litres de fuel = 10 kWh = 0,622 €)
Il en résulte (en négligeant la récupération de la consommation du ventilateur de pulsion sous forme de chaleur) :
Économie totale = Economie en chauffage + Economie électrique = NB heures x (0,24 [c€/h] + 1,09 [c€/h])
Nombre d’heures d’inoccupation du bureau = NB heures = 30 [€/an] / 0,0133 [c€/h] = 2 256 [heures/an]
Si on imagine qu’en complément de la détection de présence par bureau, le ventilateur est mis à l’arrêt lorsque toutes les bouches sont fermées (la nuit et les week-ends), pour éviter que celui ne tourne dans son jus, le temps maximum de fonctionnement de l’installation de ventilation est estimé à 2 500 heures par an (250 journées de 10 h). L’investissement peut donc être facilement rentabilisé dans le temps prévu (5 ans), rien qu’en coupant la ventilation le weekend, la rentabilité est déjà atteinte !
En conclusion
La gestion de la ventilation à la demande (c’est-à-dire par sonde de qualité d’air ou détection de présence) ne peut se justifier que
- pour des débits gérés par sondes suffisamment importants,
- pour des temps de fonctionnement à régime réduits suffisamment importants par rapport au temps de fonctionnement total de l’installation de ventilation.
Dans les autres cas, il faut se contenter de systèmes très simples comme la simple horloge sur l’extraction.